En direct
A suivre

La semaine de Philippe Labro : le règne du cinéma, les rois du grand écran

Malgré la télé, les DVD, la VOD et les réseaux sociaux, les salles obscures françaises continuent d'attirer une foule de spectateurs. [ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour Direct Matin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

VENDREDI 24 FÉVRIER

On n’y échappera pas : c’est le grand week-end du cinéma. Ce soir, Salle Pleyel, à Paris, les Césars. Dimanche, à Hollywood, les Oscars. En vérité, ce n’est pas seulement le week-end du cinéma, c’est la grande et belle saison de cet art qui, comme l’a dit André Malraux, est aussi une industrie. Rarement les chiffres et les statistiques ont autant illustré la bonne santé du film, des films. C’est presque vertigineux : 213 millions de tickets ont été vendus en 2016 en France. C’est, selon un bilan détaillé de notre confrère Le Monde, paru mardi dernier, «la deuxième meilleure année depuis vingt ans pour le premier parc de salles d’Europe et le troisième au monde».

Arrêtons-nous un instant sur cette réalité et demandons-nous pourquoi, malgré la prolifération de chaînes de télévision, le podcast, le DVD, la VOD, les réseaux sociaux, tout ce qui pourrait détourner le grand public d’une fréquentation des salles, malgré tout, les gens «vont au cinéma». Ils sortent de chez eux, ils abandonnent les outils de la modernité pour aller s’enfermer dans des salles obscures, aux côtés d’inconnus pour, durant deux heures, s’évader, rire, pleurer, avoir peur, être concernés, être heureux, être différents… A quoi est due cette ferveur ?

Plusieurs éléments : l’excellente qualité des salles, les innovations et améliorations techniques, les facilités multiples – la «chronologie des médias» qui fait qu’un nouveau film, dont tout le monde vous aura parlé, bénéficie de quatre mois de diffusion exclusive en salles avant d’être livré aux autres moyens de diffusion. Et puis, et avant tout, il y a les films. Bons ou mauvais, gros machins ou petits essais, ils vous entraînent tous ailleurs, vous permettent d’échapper à la grisaille de l’actualité, à l’inquiétude devant les remous politiques, les incertitudes, les scandales, les extravagances, les mensonges, les impostures, les injustices, les horreurs… Le cinéma est l’un des plus vigoureux antidotes au «chaos» que connaissent nos contemporains. Il y a les actrices, les acteurs, la musique, l’invention, les décors, la science du montage, la sensation, parfois, qu’à chaque minute, on va être dérangé, séduit, charmé, effrayé, interpellé par les choix, les attitudes, les situations… 

C’est génial, le cinéma – et c’est cela, finalement, qui va être célébré aux Césars et aux Oscars : le cinéma comme manière de vivre une autre vie que la vie, ne fût-ce que pendant quelques heures. Mon rôle n’est pas celui de pronostiqueur – il semble évident que Juste  la fin du monde, de Xavier Dolan, et Elle, de Paul Verhoeven, vont recueillir ­­de nombreux votes. Il est manifeste ­qu’Isabelle Huppert, étonnante dans sa faculté à nous faire croire à un personnage double, ambigu, audacieux et décalé, est destinée, avec ce film, aussi bien à une «césarisation» qu’à une «oscarisation». Et il est évident, aussi, qu’à Hollywood, La La Land va rafler pas mal de statuettes. Les artistes américains couronnés pourraient en profiter pour faire passer quelques messages (je ne suis pas sûr que Donald Trump sera forcément heureux de cette soirée), ce qui est devenu un rituel.

Des millions de téléspectateurs, des millions d’internautes, vont commenter, discuter, critiquer, applaudir – ce sera, deux fois en deux jours, la grande parenthèse qui fera, peut-être, oublier la course à la présidence – 23 avril, premier tour ! Mais il est une autre date qui nous fera revenir aux films : Cannes. Cela se passera en mai prochain, la 70e édition du fameux Festival. Vive le cinéma, vive le cinéma !

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités