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Cécile de France, la plus française des actrices belges

Cécile de France en 2011[CC/Philippe Quaisse]

Cécile de France, comédienne belge formée au théâtre est devenu l’une des actrices les plus recherchées du cinéma français.  Elle a l’air toute simple, avec un regard franc et un sourire charmeur. Pourtant, Cécile de France se renouvelle toujours, sans jamais perdre de cette sincérité ébouriffée. Portrait d’une actrice qui, en quelques années, a su conquérir le public jusqu’à devenir l’une des artistes préférées des Français.

 

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À la différence des autres figures de proues de sa génération, c’est sur la pointe des pieds que Cécile de France s’est fait une place au soleil. Audrey Tautou a été propulsée au rang de star grâce au rôle d’Amélie Poulain. Marion Cotillard est entrée dans une nouvelle dimension après avoir incarné la légendaire Edith Piaf. Ludivine Sagnier s’est révélée en tant qu’égérie de François Ozon, donnant corps à toute l’intensité sensuelle et sulfureuse sur laquelle s’appuie le film Swimming Pool.

Pas de rôle emblématique auquel on la renvoie systématiquement. Pas de film reposant uniquement sur ses épaules et qu’elle ait eu à porter seule. Pas de mentor qui ait fait d’elle sa muse cinématographique. Ce qui ne l’a pas empêchée d’intégrer, en moins d’une dizaine d’années, le ghota des jeunes actrices les plus demandées et les plus populaires.

 

Vidéo : Interview de Cécile de France

 

 

Des planches de Namur aux écrans parisiens

Comme son nom ne l’indique pas, Cécile de France est née le 17 juillet 1975 à Namur, la capitale de la Wallonie, région belge francophone. Rien à voir avec la princesse française du même nom qui épousa Tancrède de Hauteville, régent d’Antioche et prince de Galilée pendant les Croisades.

Passionnée de théâtre depuis son adolescence, elle joue dans tous les spectacles amateurs qui se présentent à elle. C’est à quinze ans que Cécile de France transforme ce penchant en vocation et commence à apprendre l’art dramatique auprès de Jean-Michel Frère. Une vocation suffisamment ardente pour la pousser à rejoindre Paris, à l’âge de dix-sept ans. Là, elle finance ses cours de théâtre avec un emploi de jeune fille au pair et arrondit les fins de mois en jouant les cracheuses de feu dans les rues du Quartier latin.

Entre 1992 et 1994, Cécile de France est l’élève de Jean-Paul Denizon, acteur et assistant du célèbre metteur en scène britannique Peter Brooks. Elle intègre ensuite l’Ecole nationale supérieure des arts et technique du théâtre, rue Blanche. C’est alors qu’elle est découverte par l’agent Dominique Besnehard, qui suit les carrières de Charlotte Gainsbourg, Sophie Marceau ou encore Isabelle Adjani. Sans cesser de s’adonner au théâtre, la jeune femme enchaîne les courts métrages et apparaît aussi à la télévision.

C’est Richard Berry qui l’emmène sur les sentiers du succès, lorsqu’il lui offre son premier rôle pour un long métrage. Nous sommes en 2000 : la comédienne est à l’affiche du monument classique de Jean Racine, Electre, dans une mise en scène de Claudia Stavisky. Dans L’art (délicat) de la séduction, première réalisation de Richard Berry, où elle donne la réplique à Patrick Timsit, Cécile de France incarne Laure, femme envoûtante et intrigante qui fait fondre le cœur de son partenaire en quelques minutes. Dans ce rôle léger mais enlevé, cette inconnue charme le publique et sauve le film aux yeux de la critique. Ces premiers pas lui offrent une belle exposition, mais le film ne bat pas de record d’affluence. La consécration du grand public intervient l’année suivante.

 

Vidéo : Cécile de France dans L’Art (délicat) de la séduction (Richard Berry, 2001)

 

 

Sept ans de succès

En 2002, elle partage l’affiche de L’auberge espagnole, de Cédric Klapisch, dans lequel elle interprète Isabelle, la confidente homosexuelle de Xavier Rousseau (Romain Duris), un second rôle où elle impressionne une fois encore par son jeu direct et sans fard, sa décontraction ébouriffée et son franc-parler, ainsi que la crédibilité qu’elle donne à son duo avec Duris. font l’unanimité. La profession la récompense avec le prestigieux prix Louis-Lumière et le césar du meilleur espoir féminin. En trois longs métrages (il y eut entre-temps une apparition dans le confidentiel Toutes les nuits, d’Eugène Green), l’expatriée belge est adoptée parle public français. Sans chercher à conforter sa situation de jeune première, elle prend le pari de jouer dans des premiers films (Irène, A+ Pollux, Les mythes urbains), ou s’essaie au film de genre (Haute Tension).

En 2004, elle tente un essai à Hollywood, le temps d’une apparition éclair dans l’adaptation du roman de Jules Verne Le tour du monde en 80 jours, produit par les studios Walt Disney Pictures. Elle y incarne une jeune peintre impressionniste française, un personnage inventé pour cette version et dont Phileas Fogg tombe amoureux. Même si ce film ne peut pas occulter celui de 1956 avec David Niven (oscar du meilleur film), ou même l’adaptation à la télévision de six heures, où le gentleman anglais était interprété par l’Irlandais Pierce Brosnan, elle lui donne l’occasion de se faire connaître outre-Atlantique, en figurant dans un casting qui réunit Arnold Schwarzenegger et Jackie Chan.

Une expérience qui ne semble pas avoir séduit la comédienne, qui n’a plus traversé l’Atlantique pour des raisons professionnelles depuis, hormis en 2010 pour jouer sous la direction de Clint Eastwood dans Au-Delà. Elle a en revanche tourné pour Etienne Chatillez (La confiance règne) avant de retrouver Richard Berry dans Moi César, 10 ans 1/2, 1m39, (2002) où elle incarne le petit rôle hilarant d’une starlette un peu cruche, qui confond «Amérique et numérique» et  Cédric Klapisch, pour lequel elle reprend son rôle d’Isabelledans Les poupées russes, suite des aventures sentimentales des protagonistes de L’auberge espagnole. La collaboration avec le metteur en scène du Péril jeune est décidément fructueuse, puisqu’elle vaut à nouveau une distinction à Cécile de France, le césar du meilleur second rôle, en 2005.

 

Vidéo : Cécile de France dans La Confiance règne (Étienne Chatillez, 2003)

 

 

Égérie d’une génération

Cécile de France est dès lors une des figures incontournables du renouveau du cinéma français, de cette jeune génération, ni épique, ni marginale, mais qui vit dans un monde où l’optimisme reste la seule arme contre la folie du monde du spectacle. Une partition qu’elle joue en donnant la réplique à Albert Dupontel ou à la grande et regrettée Suzanne Flon, dans Fauteuils d’orchestre de Danièle Thompson (2006), petit bijou sur les désirs et les talents qui se croisent dans le Paris du show-biz, et dans Quand j’étais chanteur, où elle donne la réplique à Gérard Depardieu.

En 2005, la jeune comédienne est à l’affiche des Poupées russes (Cédric Klapisch), la suite de L’auberge espagnole. Elle y retrouve Romain Duris, qui cherche l’âme sœur entre un mariage à Saint-Pétersbourg, deux squats chez des copains et trois allers-retours à Londres. Cécile de France est radieuse et assurée comme jamais dans le rôle de la bonne copine qui réussit tout, y compris à se remettre de ses chagrins d’amour. Légèreté et justesse. Le film révèle les deux vertus de ce jeu, qui la distingue parmi les actrices de sa génération et lui vaut son deuxième césar, celui de la meilleure actrice dans un second rôle.

Elle succède cette année-là à Monica Bellucci comme maîtresse de cérémonie du 58e Festival de Cannes et obtient le prix Romy-Schneider du meilleur espoir du cinéma français. En 2007, elle est nominée deux fois pour le césar de la meilleure actrice (pour Fauteuils d’orchestre et Quand j’étais chanteur de Xavier Giannoli). C’est pour ce dernier film (ainsi que pour Mauvaise foi, de Roschdy Zem) qu’elle obtient en 2007 l’Etoile d’or du premier rôle féminin.

 

Vidéo : Cécile de France dans Fauteuils d’Orchestre (Danièle Thompson, 2006)

 

 

Un talent méthodique

Cécile de France a ce don pour être toujours juste, qu’elle incarne une jeune femme lesbienne et décomplexée devant la caméra de Cédric Klapisch (L’auberge espagnole en 2002, Les poupées russes en 2005, Casse-tête chinois, 2013) ou une jeune provinciale qui s’amuse de découvrir Paris sans rien perdre de sa fraîcheur (Fauteuils d’orchestre, de Danièle Thompson, en 2005). Peut-être cette force vient-elle de l’objectivité avec laquelle elle aborde son métier. «Je n’ai pas besoin de sentir une proximité avec mon personnage», explique-t-elle. «C’est une vraie composition que je façonne au fil des jours, en peaufinant tel ou tel détail, telle ou telle attitude.»

Nageuse, amoureuse, sensuelle. Affectueuse et affectée. Une fois encore, ou peut-être comme toujours, Cécile de France surprend. Dans Un secret de Claude Miller, la comédienne incarne Tania, championne de natation et modèle, belle et forte. Une femme qui, comme beaucoup d’autres, a vu son destin bouleversé par l’amour et la guerre. L’amour qui naît avant la guerre, et qui doit se cacher devant la violence de l’Histoire. Une femme qui doit composer avec sa culpabilité et sa passion pour élever un fils, François, qui ne satisfait jamais son père et qui ne se satisfait pas de ce qu’on lui dit. Qui doit attendre ses quinze ans pour, le secret enfin révélé, commencer enfin la construction de sa propre identité.

 

Vidéo : Bande-annonce d’Un Secret (Claude Miller, 2006)

 

 

Pour jouer Tania, elle s’est entraînée avec un coach, qui lui a appris les nages en vogue dans les années 1930, mais elle a aussi rencontré à plusieurs reprises Philippe Grimbert, l’auteur du roman autobiographique dont est tiré le film. Au-delà de la question de la proximité avec Tania, la comédienne belge a voulu accomplir son « devoir de mémoire à l’égard du peuple juif et de son histoire ». Le rôle lui permet d’exprimer «une tragédie qui l’habite».

Avec discipline, Cécile de France ne joue jamais Cécile de France, et investit dans chaque rôle la constance et la générosité qu’elle a héritée de sa passion pour le théâtre. Le rôle de Tania est un véritable rôle de composition pour la jeune femme, qui va de succès en succès, sans oublier de se renouveler. Mais, chez Tania comme pour ses personnages précédents, le terme qui définit le mieux le talent de Cécile de France est la justesse.

 

Vidéo : Cécile de France dans Mesrine : l’instinct de mort (Jean-François Richet, 2008)

 

 

Dans Mesrine, l’instinct de mort (Jean-François Richet, 2008), elle incarne Jeanne Schneider, la petite amie de celui qui n’est pas encore à l’époque l’ennemi public n°1. Un rôle sombre et complexe encore inédit de son répertoire de comédienne. Ce rôle, plus tourmenté et ambivalent que ses précédentes compositions, est un nouveau jalon sur le parcours de la comédienne belge. Si l’on en croit le réalisateur, Jean-François Richet, l’expérience a été concluante : «Pour interpréter Janou, une femme forte et dure, en symbiose totale avec Mesrine, Cécile m’a donné quelque chose qu’on ne lui avait jamais proposé. J’ai rarement travaillé avec une actrice qui comprend le détail de cette façon, et cela sert le tout. Je ne sais pas si elle en a conscience, mais elle capte tout de la caméra ou de la lumière».

 

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