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«France» avec Léa Seydoux : Bruno Dumont égratigne le monde des médias

Si son interprète principale Léa Seydoux, positive au Covid-19, n’était pas présente pour sa présentation officielle, «France», de Bruno Dumont, a fait son entrée en compétition, jeudi, au 74e Festival de Cannes.

Ce long-métrage qui compte aussi Blanche Gardin et Benjamin Biolay au casting, commence fort avec une conférence de presse élyséenne en présence du président Macron tancé par France au quart de tour.

France ? C'est France de Meurs : la journaliste superstar d'une chaîne d'info en continu, flanquée d'une assistante excentrique au langage et à la gestuelle pas très «cathodiques» (Blanche Gardin toujours croustillante).

France vit dans un monde à part. Son appartement ressemble à un musée, son mari (Benjamin Biolay) et son jeune fils sont aussi chaleureux qu'un prompteur, sa garde-robe semble être celle d'un festival de cinéma, son quotidien est millimétré entre son émission TV, ses reportages sur le terrain (de conflits), ses signatures d'autographes, ses selfies, ses rendez-vous officiels et ses emplettes dans les boutiques de luxe. Tout un programme.

Mais un jour au volant, France se retrouve responsable d'un accident de scooter. Très perturbée, sa vision des choses commencera peu à peu à changer. Une grande mélancolie dépressive va-t-elle accélérer cette prévisible mue ?

La célébrité passée au crible

Pointer les effets pervers de la célébrité, l'hypocrisie éditoriale de certains grands médias avides de sensation et d'audimat, dénoncer l'usurpation et l'illégitimité des nantis du PAF qui parlent aux noms des victimes ou des combattants en les manipulant sur le terrain. On saisit rapidement les intentions louables du réalisateur atypique de «L'humanité» et «Ma Loute», même s'il ne fait pas dans la dentelle et privilégie parfois la caricature grotesque, quitte à sonner un peu faux.

Mais peu importe, Bruno Dumont s'attache au personnage iconique de France, à sa fragilité, à sa détresse et à ce qui se dissimule sous le vernis. Car France prendra peu à peu conscience de la vacuité qui l'entoure, de l'illusion et des artifices qui régulent sa vie. Trahie par un amant qu'elle idéalisa le temps d'un séjour thérapeutique en montagne, France ne se berce plus d'illusions. Elle pleurniche souvent, dissimule laborieusement son mal-être, croule sous les terribles épreuves de la vie. À ce jeu particulier - et constamment à l'écran -, Léa Seydoux se prête avec générosité et hauteur en apportant au personnage de France, l'aura nécessaire et les fêlures apparentes.

Bruno Dumont dirige et filme l'ensemble comme un opéra baroque, avec un regard très personnel (qui ferait passer certaines scènes bancales pour des essais hasardeux), et un appétit de couleurs criardes, surchargées de lumières vives, de maquillage à outrance, comme pour souligner l'artifice du milieu. Tout ce qui brille… C'est furieusement impressionnant.

Grandiloquent parfois (une scène de conduite en montagne rappelle le début de «Shining») et finalement touchant. Enfin, les musiques du regretté Christophe apportent une belle touche à ce film surprenant et singulier.

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