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Cinéma : pour Rebecca Marder, «c’est un honneur d’incarner Simone Veil»

Cette fille d'une journaliste critique de théâtre et d'un musicien sera aussi à l'affiche de la comédie musicale «La grande magie», de Noémie Lvovsky, en février 2023. [© Lou BENOIST / AFP]

Dans le biopic «Simone, le voyage du siècle», qui sortira en salles ce mercredi, Rebecca Marder, nouveau visage du cinéma français, incarne Simone Veil, de l’adolescence à ses 37 ans. Rencontre avec la jeune actrice qui considère ce rôle comme «un cadeau de la vie».

Celle qui, enfant, s’imaginait musicienne, avant finalement d’intégrer la Comédie-Française à seulement 20 ans - maison qu’elle a quittée depuis -, enchaîne actuellement les projets cinématographiques, faisant d’elle l’une des comédiennes les plus demandées de sa génération. A 27 ans, Rebecca Marder, lumineuse, pétillante et solaire, crève littéralement l’écran. Et elle le prouve une nouvelle fois dans le biopic «Simone, le voyage du siècle» d’Olivier Dahan («La Môme»), attendu en salles ce 12 octobre, dans lequel elle prête ses traits à Simone Veil, jeune, tandis qu’Elsa Zylberstein campe l’ancienne ministre de la Santé plus âgée. Une expérience qui reste pour cette passionnée de théâtre et de cinéma, «l’une des plus importantes de sa carrière».

Avant d’incarner Simone Veil sur grand écran, que connaissiez-vous de cette femme, rescapée de la Shoah et figure iconique des droits des femmes, qui s’est éteinte le 30 juin 2017, à l’âge de 89 ans ?  

Deux ans avant de passer les auditions pour ce film, j’avais lu son autobiographie, «Une vie», qui m’avait bouleversée. Je connaissais son combat pour la dépénalisation de l’avortement mais j’ignorais qu’elle s’était battue notamment pour la dignité des prisonniers. Je trouve cela incroyable qu’elle ait eu le courage de retourner dans les prisons, après avoir connu la déportation. Et deux ans à peine après son retour des camps, elle pensait déjà à l’Europe. J'ai aussi découvert qu’elle s’était investie auprès des malades atteints du VIH et des toxicomanes. 

Comment vous êtes-vous préparée pour ce rôle ?

Avec Olivier Dahan, le réalisateur, nous avons beaucoup discuté et échangé énormément de documentations à propos de Simone Veil. J’ai passé mes nuits sur le site de l’INA (Institut national de l’audiovisuel, ndlr) à l'observer. Notamment son regard unique, quelque part entre les vivants et les morts. Et ses sourcils très fixes, quasiment immobiles, tout le contraire de moi qui ai tendance à faire trop de mimiques.

J'avais envie d'être à la hauteur du personnage, de cette femme au destin hors du commun.

J’ai écouté aussi sa voix deux heures par jour pendant les moments qui précédaient le tournage. Sans être dans un travail d’imitation, j’ai tenté de me rapprocher d’elle au plus près. Il fallait lui rester fidèle. 

Ressent-on une pression supplémentaire à jouer une telle icône française ?

Lorsqu’Olivier Dahan m’a annoncée que je faisais partie de l’aventure, j’étais à la fois heureuse, galvanisée, et totalement pressurisée. J’avais envie d’être à la hauteur du personnage, de la confiance qui m’était donnée d’incarner cette femme au destin hors du commun. En tant qu’acteur, se glisser dans la peau d’un personnage qui a réellement existé ne permet pas la même liberté de jeu que dans une fiction. On souhaite lui rendre hommage. On est obligé de se mettre vraiment à la place de cette personne sans la trahir. 

Quel(s) souvenir(s) garderez-vous de ce film qui revient sur les combats de Simone Veil, ses drames personnels et son amour pour son mari Antoine et sa mère Yvonne, morte peu avant la libération des camps ? 

Ce fut l’une des plus importantes et incroyables expériences de ma vie. C’est phénoménal d’avoir eu la chance d’incarner Simone Veil. Que ce soient mes partenaires de jeu ou les équipes techniques, nous étions tous très concentrés pendant le tournage pour être à la hauteur. 

Simone Veil n'a jamais perdu la foi en l'humanité, en ayant pourtant vécu le pire.

Je garde en mémoire les dernières scènes tournées à Budapest, en Hongrie, où le camp d’Auschwitz-Birkenau avait été reconstitué pour les besoins du film. Ce fut très émouvant de repenser à cette période sombre de l’Histoire. 

Au regard de l’actualité, ce long-métrage est-il plus que jamais nécessaire ?

Il l’est, en effet. Malheureusement, l’Histoire n’est qu’une boucle, et les événements n’ont de cesse de se répéter. Tous les sujets abordés dans ce film sont encore et toujours d’actualité. L’avortement, l’immigration, l’Europe, la guerre en Ukraine, l’extrême-droite en Italie… Tout cela résonne avec les combats que menaient déjà Simone Veil de son vivant. Elle était une pionnière. Elle n’a jamais perdu foi en l’humanité, en ayant pourtant vécu le pire. Je ne sais pas comment elle a fait. Elle avait une telle force… Malgré un sujet lourd, ce biopic transmet un message d’espoir. En tant qu’héritiers de ces femmes et de ces hommes qui se sont battus pour la liberté, nous devons nous aimer les uns les autres et rester vigilants face aux dangers qui pourraient menacer l’humanité. 

«La Rafle» sur le Vél’d’Hiv, il y a douze ans, «Une jeune fille qui va bien», dans lequel vous interprétez une Juive qui rêve de rentrer au Conservatoire sous l’Occupation, et «Simone, le voyage du siècle» qui revient sur la Shoah… La Seconde Guerre mondiale, une période qui revient souvent dans votre filmographique. Hasard ou choix délibéré ?

C’est très étrange, mais c’est un pur hasard. Je n’y suis pour rien puisque pour chaque film, j’ai passé des castings. Je n'ai donc rien choisi délibérément. J’ai peut-être des ancêtres qui essaient de m’envoyer des messages et me demandent de parler pour eux (rires). «Une jeune fille qui va bien» et «Simone, le voyage du siècle», sortis tous les deux cette année, ne sont pas des films qui parlent exclusivement de la Shoah. Ils mettent en lumière deux femmes qui ont des forces de caractère et de vie incroyables. Elles sont en prise avec leur destin quand celui-ci bascule.

A l’instar de Marion Cotillard, Juliette Binoche ou Isabelle Adjani, vous faites partie de cette cinquantaine d’artistes et de militantes qui, dans une vidéo diffusée le 5 octobre dernier, se sont filmées en train de se couper une mèche de cheveux, en soutien aux femmes iraniennes après la mort de Mahsa Amini...

C’est important de ne pas faire silence et de montrer que nous sommes solidaires avec elles, même si nous, nous avons la chance d’être nées dans un pays libre et qu’en cela, nous sommes privilégiées. En temps de crise, les droits des femmes sont et seront toujours remis en question. Il faut sans cesse se battre. 

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