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Cinéma : on a vu «Saw X», le retour sanguinolent et émouvant de Jigsaw au cinéma

20 ans après le tour de force signé James Wan, la franchise horrifique Saw se dote, avec «Saw X», de l'un de ses meilleurs épisodes. Le retour de John Kramer, désormais vu comme le héros de l'histoire, et une direction artistique de haute volée font de cette suite une pépite gore et étonnamment émouvante.

«J'ai encore tellement de choses à accomplir» se désole John Kramer en introduction de «Saw X». Surprise pour le spectateur, Jigsaw est de retour et plus vivant que jamais. Le réalisateur Kevin Greutert et les scénaristes Josh Stolberg et Pete Goldfinger ont fait le choix de l'«interquel», soit une suite se déroulant entre deux épisodes déjà existants. Ainsi, l'histoire de «Saw X», bien qu'il s'agisse du dixième épisode de la célèbre franchise horrifique initiée par James Wan il y a bientôt 20 ans, se déroule entre «Saw» premier du nom et «Saw 2».

Kramer contre Kramer

Atteint d'un cancer du cerveau incurable, John Kramer garde espoir de trouver un remède à sa maladie. Il entend alors parler d'un traitement miracle à Mexico City. Malgré les apparences louables et les témoignages qui lui sont donnés, l'homme se rend compte qu'il a été floué. Il décide alors de faire payer à ses charlatans cette imposture, à sa méthode, en les emprisonnant dans des pièges mortels.

Dans l'esprit du public, Saw est toujours rattaché aux mêmes qualificatifs : stupide, ultraviolent ou encore grossier. Un bouche-à-oreille justifié par l'enchaînement frénétique des épisodes, notamment du premier au septième film («Saw 3D : Chapitre final»), produits au rythme infernal d'un long-métrage par an. Chaque année, les aficionados de gore se délectaient de nouveaux pièges plus sophistiqués, souvent plus grotesques, avec une histoire toujours plus alambiquée pour faire passer la pilule. Plus tard, les tentatives du studio de relancer la franchise, avec une présence famélique de John Kramer, ont échoué.

Avec «Saw X», la volonté du studio apparaît tout autre. Le «tueur au Puzzle» devient le protagoniste principal du long-métrage, qui sera quasi-intégralement suivi de son point de vue. Dès lors, les scénaristes ont tout le temps de développer une partie de son histoire encore inconnue, à savoir sa quête d'un traitement pour son cancer. C'est d'ailleurs la première surprise du film, qui débute comme un drame humain, ne rappelant que le temps d'un court piège que le spectateur est bien dans la salle pour un nouveau film Saw. Se développent alors quelques séquences émouvantes, décuplant l'attache émotionnelle pour un vieil homme accroché à la vie tel un fauve sur sa proie.

La démarche qui amène petit-à-petit au jeu mortel n'en devient que plus logique. Tout sonne vrai et surtout personnel dans la quête de Jigsaw, qui se place comme un rédempteur face à ses victimes : sur-iconisé, entre le juge et la figure apostolique. Tel un prêcheur diffusant la bonne parole, il joue toujours de son sens du verbe pour présenter ses pièges machiavéliques, son habituelle froideur disparaissant au profit d'une étonnante humanité. Résultat, si la voix rauque de l'impérial Tobin Bell glace toujours le sang, le discours paraît largement plus sincère dans la volonté de voir les victimes s'en sortir et réhabiliter leur âme.

Tragédie humaine

Un sentiment renforcé par une direction artistique largement élevée par rapport aux précédents volets de la franchise. De retour derrière la caméra avec avoir réalisé «Saw 6», l'une des meilleures suites, Kevin Greutert filme ce jeu mortel comme une pièce de théâtre, en disséminant de nombreux détails pour renforcer la tragédie humaine qui se joue sous nos yeux : quatre colonnes rappelant l'architecture grecque, des personnages répartis intelligemment dans la pièce pour tenter de s'entraider, ou encore cet escalier permettant au narrateur (en l'occurrence, Jigsaw) d'aller et venir à sa guise pour tordre l'histoire selon sa volonté.

C'est aussi le sérieux travail narratif qui fait de «Saw X» une réussite. En se délestant des traditionnels flashbacks, le long-métrage gagne en fluidité mais surtout en intensité. L'alternance entre les pièges ultraviolents, dont certains font partie des meilleurs de la franchise (notamment le piège de la chirurgie cérébrale, modèle de bon suspens sans abuser du gore outrancier) et les dialogues plus profonds et humanistes qu'à l'accoutumée dans la saga nous cramponnent littéralement à notre siège. Le tout, renforcé par la bande originale superbement dysharmonieuse du vétéran Charlie Clouser, qui a signé les dix compositions de la franchise, un record à Hollywood.

Et si les ingrédients sont toujours les mêmes, avec son lot de twists incohérents et de grossièretés d'écriture, la sensation d'un retour en grâce de la saga Saw est bien là. Tordu, sanguinolent et viscéral, «Saw X» est l'épisode attendu depuis plus de 10 ans par les fans de la première heure, mais aussi le film de cet Halloween 2023 au cinéma, pour le public en manque de sensations fortes. Et donne de quoi espérer à l'avenir, avec son amusante scène post-générique, de nouveaux pièges terrifiants signés Jigsaw.

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