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Finance Watch, un contre-pouvoir au lobby financier

Le secrétaire général de Finance Watch Thierry Philipponnat, le 21 décembre 2012 à Bruxelles [Georges Gobet / AFP/Archives] Le secrétaire général de Finance Watch Thierry Philipponnat, le 21 décembre 2012 à Bruxelles [Georges Gobet / AFP/Archives]

Dans les couloirs de la Commission européenne à Bruxelles, une dizaine d'experts tentent de faire contrepoids au tout-puissant lobby financier qui dépenserait chaque année plus de 300 millions d'euros pour imposer ses intérêts aux responsables politiques.

Leur association, baptisée Finance Watch, est la première de ce genre en Europe.

"Il fallait un contre-pouvoir à la puissance des banques, des fonds spéculatifs et des agences de notation dans l'élaboration des règles européennes de régulation financière", souligne son secrétaire général Thierry Philipponnat.

M. Philipponnat est un habitué des arcanes financiers. Il a notamment travaillé pendant près 10 ans pour de grandes banques comme la suisse UBS ou la française BNP Paribas. "J'ai préféré mettre cette expérience au service de l'intérêt général", explique-t-il.

A l'origine de l'association, lancée en juin 2011, une vingtaine de députés européens toute tendance politique confondue, comme Pascal Canfin (EELV), Pervenche Bérès (PS) ou Jean-Paul Gauzès (UMP).

Tous partent d'un même constat: "l'absence d'expertise indépendante en matière de réforme financière constitue un danger pour la démocratie". En quelques semaines, 200 élus signent l'appel.

"Nous sommes d'un certain côté un +Greenpeace de la Finance+, mais contrairement à l'organisation écologiste, nous ne sommes pas des militants. Pas question de s'enchaîner devant la Commission ou de désigner telle banque comme responsable. Nous voulons tenter de réformer le système de l'intérieur", explique M. Philipponnat.

Encadrement des produits dérivés, des agences de notation ou encore du trading à haute fréquences, les sujets sur lesquels porter le fer ne manquent pas.

Mais le principal cheval de bataille de l'organisation reste la réforme bancaire en France et en Europe.

"Il faut absolument une séparation stricte au sein des banques entre les activités de marchés et les activités de prêts et de dépôts. En ce sens, le projet français nous semble très insuffisant", estime M. Philipponnat.

Il souhaite aussi que la taille des établissements financiers soit réduite afin qu'ils ne présentent plus un risque systémique. En d'autres mots, que la faillite d'une grande banque ne puisse plus de plonger l'ensemble du système financier international dans la tourmente, comme on l'avait vu en 2008 avec l'effondrement de la banque américaine Lehman Brothers.

Finance Watch compte 13 salariés, d'anciens professionnels pour la plupart.

Joost Mulder a ainsi un temps fait ses armes comme lobbyiste pour l'industrie de la finance.

"Le jour où ils ont commencé à aller voir les gouvernements et à les menacer de retirer leurs capitaux du pays, j'en ai eu assez", explique ce Néerlandais quadrilingue.

"Notre but est de vulgariser les débats. Sciemment, les lobbyistes utilisent une multitude de termes techniques incompris par les hommes politiques qui ne possèdent pas une expertise suffisante", ajoute-t-il.

Les moyens de l'organisation sont limités : elle dispose d'un budget annuel d'environ 2 millions d'euros, financé en partie par la Commission et par des acteurs privés (fondations, associations et même particuliers).

A Bruxelles, les banques et autres établissements financiers ont dépêché quelque 700 experts qui bénéficient d'un budget de plus de 300 millions afin d'orienter le processus législatif dans la direction qu'ils souhaitent, selon les données fournies par plusieurs associations.

"Il est très difficile d'avoir des chiffres précis sur la puissance de feu des lobbyistes. De notre côté, il faut que nous intervenions dès l'agenda pour influencer les débats futurs qui aboutiront à des projets devant la Commission. Là, on pourra dire que nous somme devenus un véritable contre-poids".

Finance Watch compte parmi ses membres 68 associations représentant plusieurs dizaines de millions de citoyens dont Oxfam, Attac, Transparency international, plusieurs organisations syndicales (Fédération CFDT des Banques et Assurances, Confédération européenne des syndicats) et d'autres acteurs de la société civile.

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