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Un projet de bétonnage menace une plage paradisiaque d'Espagne

En arrière-plan, une vue de la ville andalouse de Tarifa datant du 5 janvier 2007, bien avant le projet de bétonnage de ses terres qui fait polémique en Espagne[AFP/Archives]

Un projet de construction sur les terres sauvages jouxtant une plage paradisiaque d'Andalousie fait enrager écologistes et baigneurs tandis que la mairie affirme qu'il soulagerait l'économie, dans cette région du sud de l'Espagne frappée par un chômage record.

Les jours de vent, et ils sont nombreux sur l'immense plage de sable proche de la petite ville de Tarifa, les dizaines de voiles multicolores des véliplanchistes et "kite-surfers" constellent la ligne d'horizon, où se détache en fond la côte marocaine.

De l'autre côté d'une étroite route: des champs d'herbes folles avec quelques rares maisons, campings et petits hôtels.

C'est là que la mairie veut faire bâtir 350 maisons et des hôtels offrant 1.400 places. En tout, 84.000 mètres carrés construits sur un terrain de 70 hectares.

"C'est une folie: ils vont détruire un paradis", s'exclame au téléphone Noelia Jurado, 37 ans, membre de la plate-forme citoyenne qui s'est créée lundi, "Sauvons Valdevaqueros", immédiatement après le vote de la mairie.

Les détails du plan approuvé par la droite et les socialistes, avec la seule opposition des écolo-communistes d'Izquierda Unida, n'ont pas encore été communiqués aux habitants.

"Il y a une grande opacité", s'indigne Noelia.

Sa colère est partagée : la page Facebook de la plate-forme compte déjà 11.000 membres et des dizaines d'internautes ont posté les photos souvenir de vacances idylliques sur le site du quotidien El Pais, qui a ouvert un espace dédié.

"Ne la détruisez pas, s'il vous plaît", s'exclame une lectrice qui a envoyé l'image de trois jeunes filles assises sur la dune dominant la plage.

L'indignation est à la mesure de la détérioration des côtes espagnoles, provoquée par des décennies de construction à outrance.

Mais l'explosion de la bulle immobilière en 2008 a plongé l'Espagne dans la crise et les experts estiment aujourd'hui à environ un million le stock de logements neufs invendus.

Ces vingt dernières années, l'Espagne aurait ainsi perdu chaque jour l'équivalent de huit terrains de football de côte vierge, soit plus de 50.000 hectares, selon Greenpeace.

"Il est incompréhensible que les responsables publics lancent encore ce type de projets alors que ce modèle économique est obsolète", affirme Pilar Marcos, responsable de la protection des côtes de l'organisation.

La grande plage de Tarifa a jusque là été épargnée, notamment grâce à ce vent qui décourage souvent le farniente.

Mais ailleurs en Andalousie, d'autres zones ont été endommagées, à l'image de l'immense carcasse d'hôtel plantée sur la plage d'Algarrobico, aux portes d'un parc naturel désertique.

Condamné à la démolition par la justice à plusieurs reprises, ce projet enthousiasme pourtant une partie des habitants qui y voient une manne bienvenue d'emplois.

Piquée au vif par les réactions indignées, la mairie de Tarifa défend son nouveau projet, qui attend encore un feu vert du gouvernement régional.

"Il s'agit d'un urbanisme moderne, très éloigné de la construction à outrance qui a peuplé nos côtes il y a des décennies", affirme le maire, Juan Andres Gil Garcia, sur le site de la mairie.

La municipalité rappelle ainsi que le projet n'autoriserait que des maisons d'un étage et des hôtels sur trois niveaux.

Surtout, il permettrait de créer de l'emploi, alors que l'Andalousie affiche un taux de chômage record de 33%.

S'y opposer va donc à l'encontre des intérêts de ses habitants, assure le maire. "C'est la pire chose qu'ils peuvent nous faire", accuse-t-il.

L'argument ne convainc par les défenseurs de la plage.

Ces hôtels et maisons "ne vont pas se remplir car la meilleure publicité pour Tarifa, c'est justement sa plage vierge", souligne Pilar Marcos.

En outre, remarque Noelia Jurado, "il reste encore à Tarifa énormément de logements neufs qui sont vides depuis quatre ans".

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