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Canicules, villes côtières englouties, pénurie d'eau... Voici à quoi ressemblerait la France avec 4°C de plus

Dans une France à +4°C, la quasi-totalité des glaciers français auront disparu. [MARCO BERTORELLO / AFP]

Selon les derniers travaux du Giec, si tous les Etats du monde n’accentuent pas leurs efforts, le réchauffement climatique sera compris entre +2,8°C et +3,2°C en 2100 en moyenne au niveau mondial, ce qui correspond à +4°C pour la France. Mais alors, à quoi ressemblerait le pays avec une telle hausse des températures ?

Alors que le dernier rapport du Giec a estimé en mars que le réchauffement climatique atteindrait la barre des +1,5°C au niveau mondial dès 2030-2035, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a déclaré qu’il fallait préparer la France à «une évolution de température de 4°C» à horizon 2100. Canicules, sécheresses, montée des eaux ou encore incendies, la France serait, dans ce scénario, inévitablement marquée par les conséquences du dérèglement climatique.

canicules

L’année 2022 a été la plus chaude jamais enregistrée en France depuis 1900. Mais ce n’est rien à côté de ce que pourrait être l’année 2100. Dans le scénario d’une augmentation moyenne de 4°C en France, les canicules pourraient durer jusqu'à deux mois en été et engendrer des températures supérieures de 15°C à la normale. Certaines zones particulièrement exposées (arc méditerranéen, couloir rhodanien, vallée de la Garonne) pourraient connaître jusqu'à 90 nuits tropicales par an. L'été 2022 pourrait ainsi devenir un exemple d'été «moyen», voire «un peu froid», à l'avenir. 

Sécheresses

Le réchauffement climatique va également accroître le risque de sécheresse, à cause d’une évaporation plus importante, du fait de la hausse des températures et des pluies qui devraient être moins bien réparties au cours de l’année. Le scénario d’une hausse moyenne de 4°C en France conduirait le pays vers un risque de sécheresse multiplié par cinq. Ces périodes de sécheresse, plus longues et plus nombreuses, entraîneraient la multiplication des événements extrêmes, tels que les incendies ou les inondations.

Incendies

L'augmentation des températures favorise l'évaporation de l'eau contenue dans les sols tandis que les végétaux «transpirent», deviennent de plus en plus secs et sont alors plus exposés aux risques d'incendies. Par ailleurs, le réchauffement climatique amplifie le risque d’incendie car il étend les zones à risque, qui remontent en altitude et en latitude. La saison des incendies débute plus tôt et finit plus tard, et l’élévation des températures nocturnes réduit la fenêtre d’intervention des pompiers qui profitaient de la nuit pour stopper les feux.

Un rapport parlementaire publié en mars dernier rappelait ainsi qu’en 2050 «près de 50% des landes et forêts hexagonales pourraient être concernées par des incendies de forêts, traditionnellement cantonnés dans les départements méridionaux». Le constat sera encore plus sévère en 2100. Lors de la canicule historique de 2003, plus de 70.000 hectares ont pris feu, et plus de 80.000 en 1976 avec la grande sécheresse. 

Inondations

Alors qu'un degré de réchauffement augmente de 7% la vapeur d'eau présente dans l'atmosphère, provoquant plus de précipitations, les menaces liées aux inondations pluviales sont importantes à court terme, et d’autant plus dangereuses à moyen terme avec une projection de +4°C en France.

Dans le scénario le plus optimiste, avec une hausse de 1,5°C, les dommages causés par les débordements de cours d'eau en Europe vont plus que doubler, à environ 15 milliards d'euros par an, selon les chercheurs. Et le nombre de personnes affectées par les inondations augmenterait de 86%, soit environ 650.000 personnes par an. Mais en cas de hausse des températures de 3°Cles dommages monteraient de 145% à environ 17 milliards d'euros par an, et 780.000 personnes seraient touchées (+123%). On peut imaginer que la France subirait une grande partie de ces dégâts.

Submersions marines

Les submersions marines (inondations de zones côtières lors d'événements météorologiques extrêmes) sont également appelées à se multiplier à long terme. Selon le Giec, le risque d'exposition à des submersions marines exceptionnelles en France pourrait concerner au moins 500.000 personnes (contre moins de 100.000 aujourd'hui) avec une hausse anticipée du niveau de la mer d'un mètre d'ici à la fin du siècle. De nombreuses villes pourraient ainsi être sous les eaux.

Une étude réalisée par le cabinet «Callendar – Climate Intelligence» a estimé que 10% des habitations côtières seront inondables d’ici à la fin du siècle. Cela pourrait représenter jusqu’à 150.000 habitations. Parmi les grandes villes les plus à risque, on retrouve Le Havre (de loin la grande ville la plus menacée), Caen, Bordeaux, Arcachon, Deauville, Bayonne, Toulon et Sète.

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Enneigement

Les régions de montagnes seront particulièrement touchées par les 4°C de réchauffement potentiel de la France, notamment à travers la perte importante de leur enneigement. «Aujourd’hui, on constate 9% de perte d’enneigement ; à +4°C, c’est 25% de perte d’enneigement et la disparition des glaciers français», explique Christophe Béchu au JDD. Il sera par exemple quasiment impossible de skier à moins de 1.600 mètres d’altitude.

C’est d’ailleurs cette perte de manteau neigeux qui explique que ce seront les régions montagneuses qui se réchaufferont le plus en France, la neige contribuant d’ordinaire à réfléchir les rayons du soleil et à refroidir la région où elle est tombée.

Pénurie d’eau

Les manteaux neigeux étant moins épais, leur fonte printanière charriera dans les vallées moins d’eau que d’ordinaire. De nombreux cours d’eau devraient ainsi être asséchés. Cet assèchement de certaines rivières symbolisera la moindre disponibilité de l’eau dans le futur. A titre d’exemple, les experts du climat estiment que celle-ci diminuera de 10 à 40% dans les prochaines décennies. Dans une France à +4°C, les pénuries d’eau se multiplieront donc avec de fortes tensions sur l'agriculture et la forêt, et la quasi-totalité des glaciers français auront disparu.

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Dégâts humains et matériels

Dans le scénario d’une augmentation des températures de 4°C en France, la multiplication des événements extrêmes et surtout des fortes chaleurs aura également des conséquences humaines et matérielles.

Selon les chiffres de l’agence européenne, 129.000 européens sont déjà morts de chaud entre 1980 et 2020, avec une forte accélération ces dernières années. Rien qu’en France, les trois épisodes caniculaires de l'été 2022, qui ont fait de cet été le deuxième plus chaud depuis 1900, ont causé une surmortalité de 2.816 décès, indique Santé publique France dans son bilan du 22 novembre 2022. 

Le nombre de morts, en moyenne, provoquées chaque année par les canicules pourraient ainsi passer de 1.500 à près de 5.000 dans la deuxième moitié du siècle si le rythme des émissions de gaz à effet de serre se poursuit. Par ailleurs, d’autres risques sont également à craindre. Par exemple, avec la hausse des températures, le moustique tigre étend sa présence en France, augmentant le risque de transmission de maladies comme la dengue, le chikungunya et Zika.

«La réalité globale du réchauffement climatique s'impose, il faut donc se préparer concrètement à ses effets inévitables sur notre territoire et sur nos vies», a expliqué ce dimanche Christophe Béchu dans le JDD. «S'adapter à ça, c'est sortir du déni», a-t-il jugé. La France devra donc miser gros sur sa stratégie pour faire face aux conséquences, d'ores et déjà quasiment inévitables, du réchauffement climatique. 

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