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Kurdes tués à Paris : l'expertise psychiatrique du tueur suggère un discernement «altéré»

Une marche en hommage aux victimes kurdes avait été organisée à Paris le 26 décembre. [JULIEN DE ROSA / AFP]

Une expertise psychiatrique de William Malet, tueur de la rue d'Enghien à Paris en décembre dernier, a conclu que son discernement était altéré «dans une certaine mesure».

William Malet, 69 ans, «n'était pas atteint [...] d'un trouble psychique» le 23 décembre dernier, lorsqu'il a abattu trois personnes kurdes, dans le 10e arrondissement de Paris. Pourtant, une expertise psychiatrique tend à montrer une altération de son discernement au moment des faits, en raison de troubles de la personnalité.

Concrètement, dans un rapport datant du 16 janvier dernier, deux psychiatres soulignent : «William Malet n'était pas atteint au moment des faits d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes». Toutefois, son examen psychiatrique «révèle des troubles de la personnalités dans un registre de paranoïa de caractère» qui justifient «dans une certaine mesure, que l'on considère son discernement comme ayant été altéré».

Réalisée le 4 janvier, l'expertise décrit William Malet, mis en examen pour assassinats et tentatives d'assassinat à caractère raciste, comme un individu «en mesure de comprendre les propos et de répondre aux questions». Tout en suggérant une altération du discernement, les deux experts affirment qu'«au jour de l'examen, l'état mental de l'intéressé ne risquait pas de compromettre l'ordre public et la sûreté des personnes».

Ils estiment par ailleurs que «chez un homme de 70 ans, après des faits d’une telle gravité, la nécessité d’une injonction thérapeutique dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire demeure très théorique.»

Six mois auparavant, le 31 août 2022, William Malet avait déjà fait l'objet d'une expertise psychiatrique, menée par un autre expert. À l'époque, cet ex-conducteur de TGV était incarcéré à la prison de la Santé pour avoir attaqué des migrants au sabre à Paris, en décembre 2021.

Établissant un «profil solitaire, anxieux et insécure», ce précédent examen n'avait, selon Le Parisien, décelé «aucune anomalie mentale» et permis la remise en liberté du suspect sous contrôle judiciaire le 12 décembre. Soit une dizaine de jours avant qu'il ne tue trois personnes rue d'Enghien.

«L'idée raciste d'une tuerie de masse»

William Malet avait également été condamné à douze mois d'emprisonnement en juin 2022 pour violences avec armes, après avoir blessé ses cambrioleurs. Il a fait appel de cette décision.

Les psychiatres ayant mené la dernière expertise psychiatrique en janvier estiment que ce cambriolage a constitué «une bascule» pour le suspect. «Se sentant démuni, impuissant, désarmé, il a conçu l'idée raciste d'une tuerie de masse suivie d'un suicide comme solution restauratrice, vengeresse, révélatrice à la face du monde de sa propre souffrance, dans un massacre perpétré contre ceux qui, selon lui, l'ont menacé et qui, dans sa vision, menacent le monde», écrivent-ils.

La communauté kurde rejette la perspective d'une reconnaissance de l'altération du discernement, qui pourrait conduire à une décision de justice plus clémente à l'égard du tueur. «On a essayé de nous dépeindre un individu déprimé qui n'avait pas toutes ses facultés» mais «il est responsable de ses actes» et il est pénalement responsable, a insisté Berivan Firat, porte-parole du Conseil démocratique kurde en France (CDK-F), partie civile, lors d'une conférence de presse, jeudi.

Les membres de la communauté kurde soulignent le fait que, le 23 décembre, William Malet est venu précisément cibler le centre kurde. Un autre porte-parole du CDK-F, Agit Polat, ajoute que, dans son expertise psychiatrique, le sexagénaire a «dit qu'il n'aime pas les Kurdes et le PKK». Le Parti des travailleurs du Kurdistan commettrait, selon le suspect, «des actions en Turquie».

Voyant «une motivation politique» dans ses propos, le CDK-F demande à ce que le parquet antiterroriste se saisisse des investigations. L'un de ses avocats, Me Christian Charrière-Bournazel, appelle au moins les juges d'instruction à explorer toutes les pistes, «pour savoir de quelle manière il aurait pu être mandaté ou influencé de manière très décisive par des agents du gouvernement actuel turc qui n'a qu'une obsession, c'est de détruire les Kurdes».

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