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Moutarde : va-t-on vers une pénurie en 2022 ?

[JEFF PACHOUD / AFP]

2022 sera-t-elle une année sans saveur ? A quelques semaines du 1er janvier, les producteurs de moutarde s’inquiètent. Ce condiment dont raffolent les Français – ils en consomment près d’un kilo chaque année – est en effet préparé à l’aide des graines de cette plante à fleurs jaunes. Et sa culture a beaucoup souffert cette année.

Plus particulièrement au Canada, premier pays producteur de graines grâce à ses immenses surfaces agricole. Le redoutable «dôme de chaleur» qui a sévi au début de l’été a ravagé des champs entiers dans l’état du Saskatchewan. Conséquence, la production accuse une baisse de 20 %, à 79.000 tonnes, selon les chiffres de StatCan qui dépend du gouvernement.

Les cinq grands groupes industriels français (Unilever, Européenne de Condiments, Charbonneaux-Brabant…) voient donc leurs commandes considérablement revues à la baisse et sont contraints de se tourner vers d’autres pays producteurs pour pouvoir remplir leurs petits pots.

Le salut viendra-t-il de la France où 6.000 ha de moutarde sont cultivés en Bourgogne? Là encore les industriels risquent d’être confrontés à un mur.

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Une fleur de moutarde ©La moutarderie Fallot

«On est passé de 12.000 tonnes par an à 4.000 aujourd’hui», explique Fabrice Génin, président de l’Association des Producteurs de Graines de Moutarde de Bourgogne (APGMB). «Avec la moutarde, cela prend du temps. Nous n’avons jamais de stocks invendus, nous ne produisons que ce qui est commandé longtemps à l’avance».

La production française subit elle aussi les aléas du réchauffement climatique. Le coupable ? Une petite bête à la carapace noire ou bleutée appelée altise. A l’âge adulte, elle grignote les plantes et à l’état de larve l’intérieur des tiges.

Ce ravageur a toujours été présent en France. Mais l’interdiction de produits phytosanitaires, jugée brutale par les agriculteurs, associée au réchauffement des températures qui permettent une fréquence accrue des cycles de reproduction de l’altise aboutissent à de véritables carnages. Des champs de moutarde peuvent être entièrement détruits explique Fabrice Génin.

Vers une hausse des prix ?

Heureusement pour les agriculteurs de la filière, la part de moutarde est relativement faible dans leur exploitation : entre 5 à 15 %. Pour Fabrice Génin, l’avenir de la moutarde n’est pas menacé : les industriels se tourneront toujours vers d’autres pays. En revanche celui du condiment 100 % made in France n’est pas assuré.

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©La moutarderie Fallot

C’est là l’inquiétude qui règne à la Moutarderie Fallot. Cette entreprise familiale indépendante – qui représente 5 % de parts de marché de l’Hexagone – mise sur une graine uniquement française. Les baisses des récoltes ont entraîné une hausse du cours du grain de moutarde qui se répercutera dans les rayons. «Chez Fallot, nous nous attendons à devoir augmenter nos prix entre 9 et 15 %», annonce Marc Désarménien, directeur de l’entreprise et petit-fils Edmond Fallot. Il explique que certaines de ses moutardes premium obéissent à un cahier des charges précis avec des ingrédients comme du vin aligoté dont le prix a bondi de 100 %.

Plus qu’une pénurie, c'est donc un bond des prix qui est à craindre dans un contexte général de forte inflation. Pour se prémunir, faut-il pour autant faire des stocks dès maintenant ? Marc Désarménien le déconseille : «Plus elle est fraîche plus elle a de saveur, c’est un produit qui vit, rien ne sert d’en stocker des années à l’avance».

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