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Flash-ball : l'Etat condamné

Un policier tient une arme de type "flash-ball" [Anne-Christine Poujoulat / AFP/Archives] Un policier tient une arme de type "flash-ball" [Anne-Christine Poujoulat / AFP/Archives]

L'Etat a été condamné à indemniser un jeune homme blessé en 2009 par un tir de type "flash-ball", une première dans ce type d'affaire.

Dans un jugement rendu mardi et consulté mercredi par l'AFP, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à indemniser Clément Alexandre, 30 ans, qui avait été touché au visage par un tir alors qu'il était pris dans des échauffourées sur la place de la Bastille lors de la Fête de la musique en juin 2009.

Le tribunal a estimé qu'au terme du code de sécurité intérieure l'Etat pouvait être tenu responsable de conséquences de violences commises lors d'attroupements, sans toutefois lui imputer de faute directe, comme l'avait pourtant demandé l'avocat du jeune homme.

Le jeune Rouennais avait eu une fracture de la mâchoire, deux dents fêlées et plusieurs plaies sur les joues. Il avait eu 45 jours d'ITT (incapacité temporaire totale de travail). Lors de l'audience du 3 décembre, il avait réclamé plus de 33.000 euros de dommages.

L'Etat devra lui verser au total 7.900 euros d'indemnisations et assumer plus de 7.000 euros de frais d'expertises.

Clément Alexandre s'était tout d'abord retourné vers la préfecture de police (PP) de Paris, qui avait rejeté sa demande d'indemnisation. La PP arguait que les "fiches d'utilisation" d'armes établies ce soir là par trois policiers de la BAC, expliquant avoir tiré place de la Bastille pour se dégager alors qu'ils étaient pris à partie par des personnes armées de bâtons et jetant des projectiles, évoquaient des tirs survenus après 00H30, alors que M. Alexandre a été pris en charge par les pompiers à 00H03.

Soutenu par un collectif "Face aux armes de la police" constitué autour de lui, le jeune homme choisit alors la voie inédite de la justice administrative pour demander réparation. Il fait établir une expertise, qui conclut que ses blessures sont "compatibles avec un tir de flash-ball à courte distance".

La responsabilité de l'Etat

Le rapporteur public (magistrat de la juridiction administrative qui donne une appréciation indépendante au tribunal), avait reconnu qu'expertises et circonstances indiquaient bien que Clément Alexandre avait été la victime involontaire des tirs des policiers, et dénoncé le "désintérêt malvenu" de la préfecture, qui n'était pas représentée lors de l'audience et n'avait déposé aucune conclusion.

Il n'a pas été possible d'obtenir immédiatement mercredi une réaction de la PP. Les parties ont deux mois pour faire appel.

Demandant au total 6.600 euros de dommages, le rapporteur avait toutefois refusé de suivre l'avocat du jeune homme, Me Etienne Noël, qui arguait que "la responsabilité de l'État est engagée s'agissant d'une arme présentant un risque exceptionnel, du fait même de l'utilisation de cette arme". Une décision qui aurait ouvert la voie au classement comme "armes dangereuses" des "flash-ball" ou lanceur de balle de défense.

Clément Alexandre et le collectif "face aux armes de la police", qui inscrivent leurs poursuites dans une démarche politique, se sont félicités de cette décision.

"Nous avons trouvé un outil qui marche", ont-ils estimé dans un communiqué, relevant que "jusqu'à présent toutes les plaintes au pénal contre les tireurs ont échoué pour des raisons qui montrent assez que de telles mutilations sont couvertes et par la police et par la justice".

Les seules condamnations ont jusqu'à présent concerné des représentants des forces de l'ordre reconnaissant n'avoir pas respecté les consignes de sécurité en utilisant ces armes.

"Pour la première fois la responsabilité de l’État est reconnue et il est condamné à verser des indemnisations", a déclaré à l'AFP Clément Alexandre, tout en regrettant le "tour de passe-passe" consistant à invoquer une responsabilité sans faute.

"Nous souhaitons élaborer une riposte collective" permettant de "viser la logique politique qui arme les armes", a-t-il dit, dénonçant "la militarisation du maintien de l'ordre".

 

 

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