L'ex-conseiller de Donald Trump, Steve Bannon, invité vedette et surprise du congrès du Front national samedi à Lille, a fait siffler les médias et promis «la victoire» au parti d'extrême droite, auquel Marine Le Pen proposera dimanche un nouveau nom pour faciliter cette accession au pouvoir.
Steve Bannon, incarnation de la droite américaine la plus dure, qui a dirigé la campagne présidentielle de Donald Trump dans la dernière ligne droite avant de devenir son conseiller à la Maison Blanche, s'est exprimé samedi en fin d'après-midi.
Qualifiant les médias de «parti d'opposition» ou de «laquais», il a provoqué des huées dans l'assistance. «L'Histoire est de notre côté et va nous mener de victoire en victoire», a ainsi déclaré Steve Bannon, devant le congrès du Front national à Lille.
«Vous faites partie d'un mouvement qui est plus grand que l'Italie, plus grand que la Pologne, plus grand que la Hongrie», a ajouté l'ancien conseiller du président américain Donald Trump.
Bienvenu à Steve Bannon qui vient s’adresser au @FN_officiel demain à notre #CongresFN2018 et rencontrer @MLP_officiel. Les peuples se réveillent et reprennent leur destin en main. Welcome to Steve Bannon who will address #FN convention in Lille tomorrow. #BannonLille pic.twitter.com/fs25DKQS86
— Louis Aliot (@louis_aliot) 9 mars 2018
«Il va nous expliquer que la victoire est possible», avait justifié Sébastien Chenu, porte-parole du FN, interrogé sur la venue de cette personnalité américaine influente et controversée, annoncée vendredi soir par le vice-président du parti Louis Aliot.
Le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement Christophe Castaner, le qualifiant de «roi des Fake news et des suprémacistes blancs», a estimé qu'avec M. Bannon le FN allait peut-être changer «de nom, mais pas de ligne politique».
C'est une visite «paradoxale» qui n'est «pas exactement la définition de la "dédiabolisation"» lancée depuis 2011, a commenté le cofondateur du FN Jean-Marie Le Pen. L'ancien président du parti, exclu par sa fille pour ses propos polémiques sur la Shoah, a avoué sa «sympathie» pour M. Bannon lors d'une séance de dédicace de ses mémoires à Paris.
Un parti «adulte»
Ce congrès doit parachever la refondation du FN engagée par Marine Le Pen depuis qu'elle en est devenue présidente en 2011, en vue des élections européennes l'an prochain où elle croit à une victoire des populistes comme en Italie.
«Le Front national est devenu adulte. (...) Il est passé d'un parti d'abord de protestation dans sa jeunesse, puis d'un parti d'opposition à un parti de gouvernement», a déclaré vendredi Mme Le Pen.
«Changer le nom, c'est une des manières de le faire savoir», a ajouté la finaliste de la présidentielle, battue par Emmanuel Macron après avoir engrangé un record de près de 11 millions de voix (33,9%) au second tour.
A l'entrée du Grand palais de Lille, Sarah Fert, enseignante de 26 ans venue de Rouen, pense qu'il faut «repartir sur d'autres bases». «On sort d'une grande période électorale, il est temps de refédérer» le parti.
Le changement de nom a été validé par une «courte majorité» de militants, a affirmé Mme Le Pen, qui proposera dimanche une nouvelle appellation avant de la soumettre à un vote des militants. Une affirmation confirmée par Sébastien Chenu, porte-parole du parti, qui a annoncé que les militants s'étaient prononcés à 52% en faveur du changement du principe d'un changement de nom.
«Accueillons (ce résultat) tel quel», a commenté M. Chenu devant les congressistes. Ce score est conforme à la «courte majorité» déjà annoncée à quelques journalistes par la présidente du FN Marine Le Pen jeudi.
Pour le responsable des jeunes au FN, Gaëtan Dussausaye, il faut «ravaler sa fierté» et changer de nom car «la marque FN est encore un blocage pour les électeurs».
«Trou d'air»
«J'ai toujours préféré le mot nation au mot patrie», confie Marine Le Pen, qui trouve «ringard» le terme «patriotes», pris par son ancien conseiller Florian Philippot pour son propre parti. Elle ne veut plus de «front», trop «militaire».
Marine Le Pen, dont l'image s'est dégradée depuis la présidentielle selon de récents sondages, estime qu'il n'y a «rien d'étonnant» à subir «un trou d'air» après sept années «d'expansion» pour son parti. Après son débat «raté» entre les deux tours face à Emmanuel Macron, certains militants se demandent si elle a encore la capacité à diriger le parti.
A Lille, elle a dit avoir «bien entendu la petite musique de guerre psychologique qui nous est menée» mais relevé la «triple» victoire remportée l'an dernier, avec près de 11 millions de voix (33,9%) au second tour de la présidentielle, «une alliance inédite» avec Nicolas Dupont-Aignan et l'élection de 8 députés.
A l'entrée du Grand palais de Lille, Sarah Fert, enseignante de 26 ans, pense qu'il faut «repartir sur d'autres bases». «On sort d'une grande période électorale, il est temps de refédérer» le parti.
Depuis la présidentielle, elle a subi deux grandes défections : sur sa gauche, celle du souverainiste Florian Philippot, qui fustige un congrès «de liquidation», et sur sa droite, la mise en retrait de sa nièce Marion Maréchal-Le Pen.
Très appréciée dans le parti, l'ex-députée a fait un retour remarqué devant les ultra-conservateurs américains le mois dernier, mais n'est pas attendue à Lille. Steve Bannon l'a qualifiée en 2016 de «nouvelle étoile montante» de l'extrême droite.
Marine Le Pen a aussi essuyé des coups de son père, qui conteste sa ligne. Mais ce dernier a renoncé à un dernier coup d'éclat et n'ira pas au congrès --une première pour lui--, où il sera déchu de sa présidence d'honneur.