«Le Monde» s'est de nouveau excusé lundi pour le «malaise» créé par la couverture de son magazine hebdomadaire présentant un montage photographique avec Emmanuel Macron, le directeur du journal estimant dans un éditorial lundi que «sa publication était une erreur».
«Puiser dans le vocabulaire visuel d'un courant esthétique du début du XXe siècle, le constructivisme, qui a imprégné les représentations des dictatures qui l'ont suivi, n'était pas un bon choix, puisque cela exposait à ce risque de confusion. S'inspirer d'un graphiste qui avait déjà utilisé ces codes pour une illustration sur Hitler ne pouvait qu'accroître ce risque», écrit Jérôme Fenoglio dans cet éditorial publié en une de l'édition du Monde datée du 1er et 2 janvier.
«Nous avons manqué de discernement dans la validation de cette couverture qui ne correspondait pas au fond du récit consacré à Emmanuel Macron dans ce numéro», poursuit le directeur dans ce papier intitulé «Notre erreur et notre responsabilité».
«Pour un journal, reconnaître ses torts revient à augmenter sa liberté d'informer, et sa crédibilité pour y parvenir», estime Jérôme Fenoglio. «Cette liberté, nous veillerons aussi à la protéger des pressions qui ont pris de nouvelles formes, depuis l'avènement des réseaux sociaux», poursuit-il.
Déplorant la «mauvaise foi» de certains détracteurs de cette «couverture ratée», il assure que «nous ne cesserons d'opposer notre travail de journalistes, qui dit chaque jour ce que nous sommes : un quotidien, un site et un magazine non partisans, qui cherchent toujours, par des informations inédites, des reportages ou des enquêtes originales, à alerter leurs lecteurs sur les grands mouvements de la planète ou du pays».
Des excuses renouvelées
Le journal s'était déjà excusé samedi par la plume de son directeur des rédactions Luc Bronner, après les vives réactions suscitées par cette une sur les réseaux sociaux, notamment parmi les partisans d'Emmanuel Macron.
La une controversée représente Emmanuel Macron, le regard dur et autoritaire, sur fond de révolution sur les Champs-Élysées, alors que le président de la République fait face à la crise sociale la plus importante de son quinquennat.
Une image sur fond de couleurs blanche et rouge, rappelant pour certains le drapeau nazi, ce dont le directeur de la rédaction s'est catégoriquement défendu.
La couverture de M le magazine du Monde a provoqué des réactions critiques de lecteurs. Nous présentons nos excuses à ceux qui ont été choqués par des intentions graphiques qui ne correspondent évidemment en rien aux reproches qui nous sont adressés https://t.co/8EoZh3SSlx
— Luc Bronner (@lucbronner) 29 décembre 2018
Les éléments utilisés faisaient référence au graphisme des constructivistes russes au début du XXe siècle, lesquels utilisaient le noir et le rouge. La couverture s’inspire par ailleurs de travaux d’artistes, notamment ceux de Lincoln Agnew.
— Luc Bronner (@lucbronner) 29 décembre 2018
Voici une série d'exemples de l’utilisation de ces références graphiques rouges et noires dans d’anciennes publications de M le magazine du Monde pic.twitter.com/xEMgE1n0Vp
— Luc Bronner (@lucbronner) 29 décembre 2018
«La couverture de M le magazine du Monde a provoqué des réactions critiques de lecteurs. Nous présentons nos excuses à ceux qui ont été choqués par des intentions graphiques qui ne correspondent évidemment en rien aux reproches qui nous sont adressés», a-t-il écrit sur son compte Twitter.
Pourtant, de nombreux internautes semblent convaincus que les références au nazisme étaient intentionnelles. Richard Ferrand, le président de l'Assemblée nationale, a comparé l'image du chef d'Etat français à une affiche de propagande d'Hitler, en déclarant : «S'il ne peut s'agir de hasard, de quoi s'agit-il alors ? ».
Hâte de comprendre ce qui fonde les références graphiques et iconographiques du @lemonde_M S’il ne peut s’agir de hasard, de quoi s’agit-il alors ? À la recherche du sens perdu... pic.twitter.com/MHMmia0G2c
— Richard Ferrand (@RichardFerrand) 29 décembre 2018