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Zoo de Pont-Scorff : quand des militants voulant sauver les animaux ne font qu'empirer les choses

Une giraffe dans son enclos au zoo de Pont-Scorff, en décembre 2019.[Damien MEYER / AFP]

L’intention avait de quoi être louable, bien qu’un peu utopique. Le rachat du zoo de Pont-Scorff par des associations, pour libérer les animaux, semble malheureusement prendre des airs de fiasco, sur fond de bataille juridique entre la préfecture et les nouveaux gérants.

La levée de fonds de décembre dernier, très médiatique et relayée par des influenceurs comme Hugo Clément, avait été un succès, avec plus de 700.000 euros recueillis, dont 250.000 venant de la poche du créateur de Meetic, Marc Simoncini.

Elle devait permettre de «libérer» les pensionnaires du zoo (environ 560) et transformer le site pour en faire un centre dédié aux animaux sauvages «sauvés du trafic», pour les soigner et les réhabiliter à la vie dans leur environnement naturel. Le nom donné au groupement des associations, «Rewild» («Réensauvager»), présentait d’ailleurs à lui seul l’ambitieux et honorable projet.

Le scepticisme des professionnels confirmé

La profession avait d’emblée fait part de son scepticisme. Le directeur du zoo de Beauval parlait d’utopie, quand l’association française des parcs zoologiques faisait part de son inquiétude, pointant que «l’investissement requis pour réintroduire chaque animal de Pont-Scorff s’élèverait à des millions d’euros». Avec le risque quasi certains de les envoyer pour la plupart vers leur mort, recense Marianne.

Depuis, tout semble aller de travers à Pont-Scorff. Si bien que la préfecture, après avoir mis en demeure le zoo de se mettre en conformité avec plusieurs points de réglementation début septembre, a pris un arrêté le 11 septembre pour y interdire la présence du public, ce qu’elle aurait constaté à deux reprises, rapporte France 3.

Une longue liste de problèmes

De nombreux griefs sont reprochés. La Direction départementale de la protection des personnes (DDPP) pointe ainsi «2.428 kg de cadavres collectés par l’équarisseur sans que l’exploitant ait documenté et recherché les causes possibles de cette mortalité», «plusieurs évasions d’animaux depuis la reprise du zoo par Rewild», la saturation de fosses d’eaux usées ou encore des médicaments périmés depuis deux ans et conservés, laissant imaginer qu’ils peuvent être encore utilisés.

Mais le point le plus important est le manque d’un «capacitaire» sur le site. Il s’agit d’une personne titulaire d’un certificat de capacité, garantissant la gestion des animaux, notamment les mammifères dangereux. Un tel agent est absent à Pont-Scorff depuis plusieurs mois, rendant impossible la présence de visiteurs.

Des jeunes lycaons souffrent également de cataracte, possiblement à cause d’une mauvaise alimentation. Ce qui fait dire à Cyril Hue, vétérinaire du zoo de la Flèche, qu’ils ne pourront jamais être réintroduits dans la nature : «ils n’auront jamais les codes de leur espèce». Le professionnel va même plus loin dans Marianne, se désolant qu’«avant de prétendre relâcher les animaux, il faut déjà les maintenir en vie». «La plupart des sympathisants des droits des animaux sont vegans», poursuit-il. «Ils se retrouvent à nourrir des lions qui avalent plusieurs kilos de bovins par repas, c’est le choc avec le réel».

Rewild se défend farouchement

D’autres personnages du secteur dénoncent le fait que ce projet n’est qu’une opération de communication pour Rewild, dont des membres ne cachent pas leur ambition de mettre fin au «business des zoos».

L’association se défend d’ailleurs farouchement des accusations qui lui sont faites. Elle s’en prend directement à la préfecture et aux anciens propriétaires, responsables selon elle d’avoir laissé les conditions de vie des animaux se dégrader depuis plusieurs années. Les 2,4 tonnes de cadavres sont «un vieux rhinocéros et une grosse vache africaine, plus des cadavres que nous avons trouvés dans les réfrigérateurs en arrivant», explique Jérôme Pinsu, nouveau gérant du site.

L’association s’est également défendue d’accueillir du public malgré l’interdiction de la préfecture, indiquant qu’il s’agissait de «deux prestataires qui encadrent des autistes ou des personnes fragiles en réinsertion». Il s’agissait donc d’entretiens avec de futures stagiaires, mais «aucunement d’une visite». Une plainte pour dénonciation calomnieuse doit être déposée, prévient Rewild dans un communiqué.

Une réouverture au printemps, sans animaux

Elle a également dévoilé un audit réalisé à sa demande sur l’état du zoo à son arrivée, qui révèlerait de nombreuses irrégularités et une absence de réaction de la DDPP. «Il y a un problème de compétence ou de complicité», dénonce Rewild. Concernant l’absence de «capacitaire», elle dit être en instance de recrutement.

Reste que le problème est désormais de savoir dans quelles conditions vivent les animaux, alors que le zoo, qui n’enregistre aucune entrée et donc aucune recette, consomme 3.000 euros par jour. Une nouvelle campagne médiatique pour collecter plus d’argent sera peut-être bientôt à nouveau nécessaire, pour continuer à les nourrir et s’en occuper jusqu’à la réouverture. Celle-ci est prévue au printemps, où accrobranche et restauration seront proposés, mais sans visite des animaux.

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