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Immigration : un rapport du Sénat pointe un droit des étrangers «illisible et incompréhensible»

Procédures erratiques de demande de titre de séjours, explosion du contentieux, inefficacité des mesures d’éloignement…Une mission d’information du Sénat analyse avec sévérité des dispositifs de gestion de l’immigration.

Près de 200.000 personnes seraient entrées irrégulièrement dans l’Union européenne en 2021. Face à ce constat, la commission des lois du Sénat a mis en place une mission d’information afin d’évaluer les politiques publiques destinées à répondre à «ce défi».

Dans son rapport intitulé «Services de l’Etat et immigration : retrouver sens et efficacité» adopté mardi soir, celle-ci décrit l'échec de la gestion de l'immigration en France : «Un droit des étrangers devenu illisible et incompréhensible» ; «source de difficultés quotidiennes pour les agents de l’Etat chargés de le faire appliquer»; «véritable fonds de commerce pour certains cabinets d’avocats ou de juristes qui n’hésitent pas à en exploiter les failles à des fins lucratives».

un trafic de rendez-vous en préfecture

Jusqu’en 2020, de longues files d’attente à l’extérieur des préfectures pour obtenir un titre de séjour étaient l’illustration visible de la «saturation des guichets». Depuis le confinement, les prises de rendez-vous en ligne ont été développées mais «la rareté des créneaux offerts a suscité l’apparition d’un phénomène inédit et massif de revente sur internet des rendez-vous en préfectures, constitutif d’un véritable trafic». Ainsi, «des individus peu scrupuleux captent les créneaux disponibles (le plus souvent grâce à des logiciels de piratage) afin de les revendre de façon parfaitement illégale aux étrangers, à des tarifs allant de 20 à 600 euros par rendez-vous» 

Parmi ses recommandations, la mission préconise d’unifier par voie réglementaire les modalités de prise de rendez-vous pour le dépôt des demandes de titres entre les préfectures, et d’affecter davantage de moyens aux services chargés du séjour des étrangers.

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Mars 2022, file d'attente de réfugiés ukrainiens à la préfecture de Nice [VALERY HACHE / AFP]

Une explosion du nombre de contentieux

En l’absence de créneaux disponibles sur les sites de réservation des préfectures, les étrangers engagent des procédures juridictionnelles pour contraindre l’administration à leur accorder un rendez-vous leur permettant de déposer une demande de titre de séjour. «C'est devenu un véritable réflexe chez bon nombre d’associations. Les conséquences sont néfastes aussi bien pour le fonctionnement des tribunaux administratifs et l’organisation des préfectures, que pour l’accès des étrangers aux guichets», dénonce la mission.

Des mesures d’éloignement inefficaces

Les élus déplorent «l’incohérence entre un nombre toujours plus élevé de mesures d’éloignement prononcées et l’absence de renforts humains et financiers pour les exécuter». Le premier écueil auquel est confrontée l’administration pour l’exécution des mesures d’éloignement concerne l’identification des personnes en situation irrégulière.

Quatre priorités sont identifiées par le Sénat pour renforcer l’efficacité de ces mesures : «Renforcer la coopération entre les services pour identifier les personnes en situation irrégulière, poursuivre la montée en charge du dispositif de rétention administrative, mobiliser l’ensemble des moyens juridiques et matériels disponibles pour procéder à des éloignements et enfin, privilégier une approche européenne pour sortir de l’impasse avec les pays tiers non coopératifs en matière de retours».

La mission d’information du Sénat était conduite par le président de la commission des lois en personne, le sénateur LR du Rhône François-Noël Buffet. Elle a pu «prendre la mesure du profond désarroi auquel sont confrontés nos agents publics, de leur épuisement et du sentiment d’une perte de sens de leur métier», selon le sénateur.

 

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