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Ministres mis en examen : qu’est-ce que la «jurisprudence Balladur» ?

La «jurisprudence Balladur» a été utilisée à de nombreuses reprises tout au long de la Ve République. [Thomas SAMSON / AFP]

Le nouveau gouvernement d’Elisabeth Borne a reconduit certains ministres qui ont été ou sont actuellement mis en examen. Une annonce qui irrite certains opposants politiques et certaines professions, qui dénoncent le mépris de la «jurisprudence Balladur».

Si le nouveau gouvernement traverse actuellement une polémique en raison des accusations de viols à l’encontre de Damien Abad, ce dernier n’a pas été mis en examen.

A contrario notamment d’Eric Dupond-Moretti, reconduit au poste de garde des Sceaux, est mis en examen pour «prise illégale d’intérêts».

Devant une telle affaire judiciaire, certaines professions se sont étonnées que la «jurisprudence Balladur» n’ait pas été appliquée, comme elle le fut pour de nombreux ministres.  

Inventée par Pierre Bérégovoy, Premier ministre socialiste entre avril 1992 et mars 1993, à l’occasion des ennuis judiciaires de Bernard Tapie, la «jurisprudence Balladur» est une règle non rédigée qui veut que tout ministre mis en examen démissionne de ses fonctions ministérielles.

Une manière de se protéger

Si cette procédure, fortement reprise par Edouard Balladur lorsqu'il était à Matignon de 1993 à 1995, ce qui explique son nom, consiste principalement à protéger le gouvernement de toute polémique, elle permet également au ministre accusé de mieux préparer sa défense devant la justice.

Tout au long de la Ve République, de nombreux ministres ont été contraints de se plier à cette jurisprudence. Ce fut le cas d’Alain Carignon notamment, ministre de la Communication du gouvernement d’Edouard Balladur, dont la mise en examen pour complicité et recel d’abus de biens sociaux se faisait attendre.

Mais aussi pour Dominique Strauss-Kahn, ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie du gouvernement de Lionel Jospin, démis de ses fonctions en 1999 après sa mise en cause dans plusieurs affaires pour faux et usage de faux.

L’application de cette jurisprudence s’est néanmoins effritée au fur et à mesure des gouvernements. A titre d’exemple, ce principe n’a pas été respecté sous les gouvernements de François Fillon, lorsque Brice Hortefeux, alors ministre de l’Intérieur, a été mis en examen deux fois, puis condamné pour injures raciales, puis atteinte à la présomption d’innocence.

Emmanuel Macron confronté plusieurs fois à ce cas de figure

Comme tous les présidents de la Ve République, Emmanuel Macron a été amené à faire usage de cette jurisprudence. En effet, six ministres du premier quinquennat de l’actuel chef de l’Etat ont été écartés ou conduits à démissionner.

Ce fut le cas de François Bayrou, Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez, les trois ministres MoDem, pour des affaires d’assistants parlementaires au Parlement européen, de Richard Ferrand ou encore de Laura Flessel et de François de Rugy, bien qu’aucune poursuite n’ait été engagée contre ce dernier.

Néanmoins, certaines affaires ont suscité de vives polémiques en raison de la non-application de la jurisprudence. Au-delà de celle concernant Eric Dupond-Moretti, les accusations de viols de Gérald Darmanin, qui se sont achevées par un non-lieu par réquisitoire définitif du parquet de Paris, avaient déclenché une vaste campagne de demandes de démission du ministre de l’Action et des Comptes publics, puis de l’Intérieur.

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