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Une enquête ouverte après la mort d'une femme qui avait appelé le Samu

Comme Naomi Musenga en 2018, Yolande Gabriel, 65 ans, est décédée après avoir échangé au téléphone avec un médecin du SAMU qui n'a pas pris sa détresse au sérieux. [Facebook - Le Cri du Cœur de Maman]

Le 21 août 2020, Yolande Gabriel est décédée à 65 ans à la suite de violentes douleurs thoraciques. Sa famille dénonce aujourd'hui une négligence de la part d’un médecin du SAMU qu’elle avait appelé. Une enquête a finalement été ouverte

Une histoire qui n'est pas sans rappeler celle de Naomi Musenga. Yolande Gabriel est morte en août 2020, quelques heures après avoir appelé les secours. Enregistrement à l'appui, sa famille pointe le comportement du SAMU.

Une enquête a été ouverte

Grâce à la mobilisation des deux filles de Yolande notamment, le parquet de Meaux a ordonné l’ouverture d’une enquête préliminaire confiée à la gendarmerie, de longs mois après la plainte déposée par la famille en octobre 2021 pour «homicide involontaire».

Pour l'avocat de ses deux filles, Christine et Laura, «l'ouverture d’une information judiciaire» dans ce dossier «paraît indispensable».

Pour rappel, tout a commencé le soir du 20 août 2020, lorsque Yolande Gabriel, 65 ans, s’est rendue à l’hôpital de Meaux pour des douleurs thoraciques qui ne cessaient de s’intensifier.

Après quelques heures d’hospitalisation, le personnel des urgences a décidé de laisser sortir leur patiente, malgré un taux de troponine très élevé. Pourtant, Yolande Gabriel avait déjà été hospitalisée pendant deux semaines en juillet 2020, à la suite d'un diagnostic de myocardite et d’embolie pulmonaire.

Une fois rentrée chez elle, les douleurs de Yolande Gabriel ont repris de plus belle et se sont même intensifiées. Alors qu’elle se trouvait chez elle avec sa fille, la sexagénaire a décidé d’appeler les urgences, vers 7h du matin, soit quatre heures après sa sortie de l’hôpital. 

UN MÉDECIN EXPÉDITIF ET AGACÉ AU TÉLÉPHONE

Yolande Gabriel a d’abord échangé avec une assistante de régulation médicale, qui s’est elle-même étonnée que les urgences de Meaux aient refusé de la garder dans son état. L’assistante de régulation médicale a ensuite transféré l’appel de Yolande Gabriel à un médecin régulateur. Le professionnel de santé s’est tout de suite montré expéditif et impatient.

Alors qu’il demandait à sa patiente des informations sur son traitement, le médecin a affiché plusieurs signes d’agacement face à la lenteur des réponses de la sexagénaire, presque agonisante : «Madame, il faut vous calmer, vous n’avez pas 36.000 médicaments à prendre (...) Vous ne savez pas ce que vous prenez comme médicaments ?», peut-on entendre sur l'enregistrement diffusé par Médiapart, et disponible ci-dessous.

«Mais putain parlez dans le téléphone»

L’échange s’est poursuivi avec le médecin de régulation qui lui a demandé quelle était son «intention». Toujours prise de douleurs, Yolande Gabriel lui a expliqué qu’elle souhaitait être emmenée aux urgences de Jossigny, car celles de Meaux ne l'avaient pas gardée en observation. Le professionnel a alors dépassé un nouveau stade d’agacement : «Alors madame on ne va pas faire ce que vous voulez d’accord (...) Madame arrêtez», s’est-il froidement exclamé.

C’est après de nombreuses minutes d’échanges que le médecin a questionné Yolande Gabriel sur les douleurs qu’elle ressentait depuis plusieurs heures. Malheureusement, celles-ci s’étaient encore intensifiées, puis accompagnées de difficultés respiratoires, ce qui l’empêchait de se faire entendre distinctement au téléphone. 

L’agacement du médecin est alors monté d’un nouveau cran, laissant place à un comportement agressif et grossier : «Si vous ne parlez pas dans le téléphone, on ne peut pas s’entendre (...) Mais putain parlez dans le téléphone», a-t-il sommé sa patiente. 

LES ENFANTS DE YOLANDE Gabriel DÉNONCENT UN TRAItEMENT DISCRIMINATOIRE 

Les ambulances demandées par Yolande Gabriel sont arrivées plus d’une heure après son appel, mais trop tard pour sauver la sexagénaire, qui a fini par s’éteindre sous les yeux de sa fille.

Pour les deux filles de Yolande Gabriel, l'agacement et la négligence du SAMU à l'encontre de leur mère auraient été motivés par des préjugés. Lors d'un entretien accordé à Mediapart, l'une d'entre elles a évoqué l'existence d'un stéréotype familièrement appelé le «syndrome méditerranéen» :  «Certains médecins pensent que dès qu’on est d’origine africaine, caribéenne ou maghrébine, on a tendance à exagérer la douleur», a déclaré la fille de la victime d'origine martiniquaise.

Si le SAMU a réagi au comportement du médecin, il a démenti toute existence de préjugés racistes au sein de leurs services. 

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