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Haine anti-LGBT : discriminations, violences physiques ou sexuelles... Tout ce qu’il faut retenir du dernier rapport sur la situation en France

Selon le rapport de la Dilcrah, la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre est encore très présente en France. [Alain JOCARD / AFP]

Un rapport publié ce lundi, réalisé conjointement par la Dilcrah et le Conseil de l’Europe, pointe les atouts et les faiblesses de la politique de lutte contre les crimes anti-LGBT en France. Au cœur des progrès à effectuer, l’accueil des victimes par la police, dont 14% ont peur d’une réaction homophobe ou transphobe à leur égard.

Un rapport très attendu. Ce lundi 6 mars, la Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme, l'Antisémitisme et la Haine anti-LGBT (Dilcrah), a publié un rapport mené en collaboration avec le Conseil de l’Europe, qui pointe les atouts et les faiblesses du système français de lutte contre les LGBTphobies. On y apprend que la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre est encore très présente dans le pays et que les victimes font face à un arsenal législatif «complexe» et «peu lisible».

Si la France est l’un des pays européens qui a engagé le plus mesures pour assurer l’égalité des droits pour les personnes LGBT, il reste néanmoins de gros progrès à faire, constate ce rapport-fleuve qui passe en revue les atouts de notre politique avec les actions mises en place depuis le début des années 2000 en faveur de l’égalité des droits, mais qui émet aussi toute une série de recommandations pour renforcer un système qui comporte de nombreuses faiblesses. 

L'accueil «difficile» des victimes par la police 

En effet, le rapport commence par décrire «les réalités quotidiennes plus sombres toujours vécues par les personnes LGBT» en s’appuyant sur les données d’une étude réalisée par la Dilcrah. Selon cette étude, 27% des personnes LGBT ont par exemple subi des violences physiques ou sexuelles dans les cinq dernières années, spécialement en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. On apprend aussi que 55% des personnes LGBT ont été exposées à au moins une forme d’agression pour les mêmes motifs, dont 17% au cours des douze derniers mois.

Dans le détail, le rapport pointe des chiffres qui mettent en évidence l’un des points faibles de la lutte contre les LGBTphobies, qui est la relation entre les victimes et la police. Si elles sont «relativement peu» nombreuses à porter plainte (environ 20%) les victimes de haine anti-LGBT sont confrontées, d’une part, à «la complexité et à la faible lisibilité de l'arsenal législatif», et, d’autre part, à un accompagnement «inégal» selon les territoires, ainsi qu'à un accueil pour le moins difficile par certains fonctionnaires de police.

Ainsi, les victimes déclarent avoir peur ou honte de révéler leur orientation sexuelle en présence de policiers, mais aussi faire face à une crise de confiance vis-à-vis de l’institution policière. En France, les personnes LGBT sont 16% à déclarer «ne pas avoir confiance dans la police», contre 14% à l’échelle européenne, elles sont également 38% à penser que «la police ne pourrait ou ne ferait pas quelque chose pour les aider», contre 34% en Europe. Elles sont enfin 14% à «redouter une réaction homophobe ou transphobe de la police», contre 13% sur le continent.

Manque de formation des agents

Pourtant, le rapport rappelle également que les Français ont une bonne opinion globale de la police avec 72% d’opinion favorable, bien plus élevée que la justice (46%), mais il explique également que les victimes rapportent «des difficultés à déposer plainte, ou à faire enregistrer des éléments relatifs à la haine anti-LGBT». Certains fonctionnaires inciteraient notamment à ne pas «surinterpréter» des termes de haine, quand d’autres culpabiliseraient les victimes pour «leur comportement».

Le rapport précise également que certains policiers encourageraient au dépôt d’une «main courante» plutôt que d’une plainte, ou refuseraient de retenir la circonstance aggravante. «La formation des fonctionnaires est une démarche largement engagée mais qui doit encore monter en puissance. La Direction centrale de la sécurité publique évalue à 46,25% la proportion de ses agents formés à l’égalité et à la diversité», détaille le Conseil de l’Europe.

Outre la question de la police, la Dilcrah pointe également les dysfonctionnements de la justice «qui manque de personnel et de moyens pour les investigations», précise le rapport.

Des recommandations à suivre

Pour répondre à ces faiblesses et pour renforcer les efforts déjà mis en place, le rapport avance toute une série de recommandations qui pourraient notamment améliorer l’accès au droit des victimes. Par exemple, le rapport préconise de répertorier sur un site l'ensemble des acteurs et ressources en matière de lutte contre les crimes anti-LGBT, de diffuser des guides contre les LGBTphobies dans les lieux qui accueillent les victimes (gendarmerie, maisons de la justice...) et de généraliser les référents LGBT+ dans ces services, ce qui est encore très loin d’être la norme, malgré leur mise en place en 2018 par Christophe Castaner et Marlène Schiappa.

«La mise en place de ces dispositifs a été et est toujours laborieuse dans certains endroits, faute de volontaires sensibilisés notamment», explique le rapport.

Le rapport recommande également de lancer des enquêtes de victimation de façon régulière «pour tenter de mesurer le non-recours et identifier» les «besoins» des victimes de LGBTphobies qui ne portent pas plainte, en particulier celles peu présentes dans les statistiques publiques, comme les femmes lesbiennes, les personnes transgenres et intersexes.

En ce qui concerne les personnes intersexes, le rapport estime qu'il faudrait réviser la législation actuelle afin de les «protéger explicitement» contre les discriminations, l'intersexuation n'étant pas incluse pour l'heure dans la liste des critères prohibés de discrimination.

Un nouveau plan de lutte attendu

Finalement, la Dilcrah explique dans ses conclusions que malgré les initiatives mises en place par le gouvernement, «le manque chronique de moyens de certains secteurs clés, la grande disparité entre les territoires, les réticences de certains acteurs à se saisir des sujets spécifiques à la haine anti-LGBT, perçus comme controversés ou source de malaise, freinent considérablement la traduction en pratique des initiatives engagées».  

Le rapport précise également que ses recommandations devront faire partie intégrante du nouveau plan de lutte contre la haine anti-LGBT en cours d’élaboration par l’exécutif, afin de rétablir une situation d’égalité nécessaire au bon fonctionnement de notre République.

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