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Il y a 40 ans, la Marche pour l'égalité et contre le racisme transformait la France de Mitterrand

[Le 3 décembre 1983, la Marche contre le racisme et pour l'égalité arrivait à Paris. [© : FRANCK PENNANT / AFP]]

Il y a tout juste 40 ans, 100.000 personnes accueillaient, à Paris, la Marche contre le racisme et pour l'égalité des droits. Partie de Marseille, cette marche blanche historique avait, notamment, pour objectif de rassembler dans un contexte de tensions sociales.

Le 3 décembre 1983, la Marche contre le racisme et pour l'égalité arrivait à Paris après être partie de la Cayolle, une cité marseillaise. L’initiative, imaginée par le prêtre Christian Delorme et un jeune homme de 19 ans blessé par balles par un policier quelques mois plus tôt, souhaitait, entre autres, mettre en lumière les discriminations quotidiennes vécues par les immigrés et leurs descendants en France. Le 15 octobre 1983, ils étaient trente-deux à prendre le départ depuis la cité phocéenne. 

Les colères des quartiers populaires

Pour Saïd Boukenouche, 66 ans, la marche avait avant tout pour objectif d’aller à la rencontre des gens, comme il l’expliquait en octobre dernier à l’«AFP». 

«Beaucoup de jeunes vivaient dans leur cité où ils étaient enfermés et n'avaient pas du tout une vue globale de la société française. Donc c’était une sorte de ghetto. L'idée, c'était d'aller à la rencontre, si on peut dire, de la France profonde avec comme message ‘’On est ici (en France) et on veut avoir notre place, que les discriminations cessent, que les problèmes avec la police cessent’’ ». 

Selon Hanifa Taguelmint, 61 ans, les discriminations ont été l’une des principales raisons de cette marche. «On était en marge de la société et en état de guerre, car notre quotidien c'était les balles, les morts, les contrôles au faciès... le tout dans l'indifférence générale», confiait-elle, en octobre dernier, à propos du contexte.

L'un des nombreux éléments déclencheurs fut, notamment, le meurtre, en juillet de la même année, de Toufik Ouanes, 9 ans, abattu par un voisin dans la cité des 4.000 à La Courneuve, en région parisienne. Si le caractère raciste de ce meurtre reste débattu, il témoigne des tensions sociales récurrentes dans ces quartiers, dans les années 80, et du sentiment d'abandon par les pouvoirs publics. En novembre 1983, le ressentiment prend une nouvelle ampleur lorsqu'un touriste algérien est tabassé et jeté d'un train par des légionnaires.

Sept semaines de marche

Rebaptisée par certains médias «La marche des beurs», un terme qu'exècrent certains de ses initiateurs, la Marche pour l’égalité durera sept semaines et apparaîtra comme le premier «coup de gueule» des jeunes de banlieues de la deuxième génération d'immigrés, à l'issue d'une année marquée par une longue liste de jeunes tués dans des cités et par une poussée spectaculaire de l'extrême droite aux municipales. 

Si au départ, l’événement est confidentiel, la gauche au pouvoir prendra progressivement conscience du mouvement en dépêchant des émissaires lors de ses dernières étapes.

Une seule personne les a accueillis à Salon-de-Provence (Bouches- du-Rhône) 50 kilomètres plus loin, mais ils sont mille à Lyon, et, après 1.300 km, près de 100.000 de la Bastille à Montparnasse derrière le slogan «Vivre ensemble, avec nos différences, dans une société solidaire». À Paris, une délégation sera reçue par le président François Mitterrand.

À l'issue, la lutte contre les violences racistes peineront à trouver un écho, le mouvement sera néanmoins récupéré par SOS Racisme. L’association cofondée par Julien Dray, alors militant socialiste, échouera toutefois à s'implanter véritablement au plus profond des banlieues, les militants initiaux dénonçant une récupération.


À l’occasion des 40 ans de la marche, le maire de Marseille, Benoît Payan, a annoncé la création d'une «avenue de la Marche pour l’égalité et contre le racisme» dans la ville. 

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