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Journée mondiale de l'eau : «les lingettes sont un drame pour nos réseaux d'assainissement», alerte François-Marie Didier, le président du Siaap

Le Siaap possède six usines d'assainissement en Ile-de-France, avec différents bassins de traitement. [Emmanuel DUNAND / AFP]

À l'occasion de la Journée mondiale de l'eau organisée ce vendredi 22 mars, CNEWS s'est entretenu avec François-Marie Didier, président du Siaap, le service public chargé de la dépollution et de l'assainissement des eaux de plus de 9 millions de Franciliens.

Une journée en l'honneur d'un élément fondamental. Ce vendredi est marqué par la Journée mondiale de l'eau. À cette occasion, CNEWS a donné la parole à François-Marie Didier, président du Siaap, le service public majeur qui traite l'eau de millions de Franciliens. 

Pour nos lecteurs, qu’est-ce-que le SIAAP, et quel est son fonctionnement ? 

François-Marie Didier : Le Siaap existe depuis 50 ans, la première usine avait été créée en 1940 à Achères (Yvelines), et notre principale mission est de traiter les eaux usées, en provenance des particuliers (WC, douches, cuisines...), mais aussi les eaux pluviales qui s'écoulent via les égouts, jusqu'au réseau unitaire. Nous traitons également les eaux industrielles. La réglementation impose à certains secteurs de récupérer leurs eaux usées, et nous sommes chargés de les épurer. 

Combien de centres de dépollution sont opérationnels dans la Région ?

On comptabilise six usines au total. Deux dans les Yvelines, deux en Seine-Saint-Denis, une dans les Hauts-de-Seine et une dans le Val-de-Marne. L'usine de Seine-Aval (Yvelines) est la plus grande usine d'épuration d'Europe, la deuxième au monde. Grâce à nos 1.800 agents, nous traitons les eaux de 9 millions de Franciliens, ce qui correspond à 2,5 milliards litres d'eaux usées par jour, au sein de nos usines. En quelques chiffres, nous avons aussi des bassins de stockage, ce qui représente 1.800 km2 de territoire de collecte. Et nous avons 500 km de réseau d'assainissement. Nous exploitons aussi des barrages flottants, qui servent à récupérer les plastiques, les bois et tout ce qui peut s'écouler sur le fleuve. 

Comment se passe concrètement l'assainissement de l'eau ? 

L'eau est récupérée par les égouts, puis elle est collectée directement dans nos usines. La première étape est le dégrillage. Toute la grosse matière, telle que le papier toilette, est collectée. D'ailleurs, à ce sujet, notre principale problématique reste la présence de lingettes. Elles se collent contre nos dégrilleurs et finissent par les bloquer. 

Les lingettes ne sont pas du tout biodégradables

C'est un drame pour nos réseaux d'assainissement, et cela engendre des coûts considérables. Nous essayons d'ailleurs d'alerter le grand public à ce sujet. 

La deuxième étape est le désablage et le dégraissage. L'eau arrive dans de grands bassins, le sable tombe au fond de ces bassins, et la graisse (provenant à la fois des rejets industriels, des restaurants etc...), remonte à la surface. 

La troisième étape dans l'assainissement de l'eau est la décantation. Cette méthode de traitement se déroule dans d'autres bassins. Là, les matières en suspension tombent au fond, et peuvent ensuite être réutilisées, ou incinérées. Celles-ci pourront ensuite être valorisées, sous forme d’énergie, de chaleur, etc...

Enfin, nous arrivons au traitement biologique de l'eau. De l'air est envoyé dans les bassins, ce qui propage des bactéries qui ont pour rôle de faire disparaître les pollutions, comme le carbone, l'azote ou le phosphate. L'ultime étape est la clarification, cette technique qui permet d'enlever les bactéries, avant que l'eau, finalement propre, soit remise à la Seine. Pour illustrer ce processus, il faut comprendre qu'une goutte d'eau met six heures entre le moment où nous la collectons et l'instant où elle rejoint la Marne ou la Seine.

Quelles évolutions avez-vous constatées depuis votre arrivée à la présidence du Siaap en 2021 ? 

Le Siaap est un service public, et je m'inscris dans la continuité de son fonctionnement. Depuis mon arrivée je suis dans la transparence, pour restaurer une confiance avec les élus locaux notamment. En 2019, un bâtiment du site Seine-Aval avait brûlé. Cela avait en partie entaché l'image du Siaap. Mon objectif, dans cette seconde partie de mandat, est de tirer au maximum la performance de nos usines. 

Depuis 50 ans, on recense plus de 34 nouvelles espèces de poissons dans la Seine

Mais un peu plus largement, notre action se mesure sur la durée. Il y a 50 ans, il n'y avait que trois espèces de poissons vivant dans la Seine, aujourd'hui on en recense 37. On a aussi renaturé le fleuve, et par extension, recréé une biodiversité avec notamment des oiseaux qui viennent manger ces poissons, sur les bords de Seine et les bords de Marne. 

En août dernier, l’épreuve de nage du triathlon censée être un test pour les JO avait été annulée, idem pour la nage en eau libre. Même si votre rôle n'est pas de dépolluer la Seine, mais se joue en amont, en tant qu'acteur du secteur, quel est le paramètre le plus menaçant pour la tenue de ces épreuves, l'été prochain ?

C'est évidemment toujours délicat d'anticiper un aléa climatique. L'an dernier, nous nous sommes heurtés à des précipitations les jours précédents les épreuves test. Avec tous les acteurs du plan baignade, notamment le préfet de Région Marc Guillaume, ainsi que les scientifiques, il a toujours été clair que si cela devait se produire avant les épreuves, il y aura un report. C'est ce qui avait été décidé par les autorités compétentes l'année dernière. L'autre problématique peut également survenir d'un souci technique, comme sur le réseau d'assainissement parisien par exemple, mais à ce niveau-là, des mesures ont été prises en amont de l'événement. 

Au Siaap, nous restons dans notre mission historique qui est de traiter efficacement les eaux usées, et nos agents en seront d'autant plus fiers lors des Jeux olympiques de Paris 2024

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