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Déposer son portable à l'entrée du collège : la proposition de Nicole Belloubet peut-elle réellement s'appliquer ?

Les écoles sont-elles réellement en mesure d’obliger leurs élèves à déposer leurs téléphones portables à l’entrée de leur établissement, comme l’a proposé la ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet ?

Une proposition difficile à appliquer en pratique. Nicole Belloubet a exprimé dimanche 7 avril sur France Inter sa volonté d’encadrer plus fermement l’usage des téléphones portables au collège. 

La ministre de l’Éducation nationale a ainsi suggéré l’idée que les élèves déposent leurs téléphones portables à l’entrée de leur établissement scolaire, invoquant la piste d’une «pause numérique». 

Si certains saluent une «prise de consience» de la ministre, ils déplorent une réalisation difficile en pratique.

«Éteindre un incendie avec un seau d’eau» ?

Pour Jean-Baptiste Verneuil, du SIES (Syndicat Indépendant de l'Enseignement du Second degré), cette éventuelle «pause numérique» correspondrait à «éteindre un incendie avec un seau d’eau». 

«Comment va-t-on obtenir d’un élève turbulent, par exemple, qu'il donne son téléphone alors qu’il refuse même de donner son carnet de correspondance ou de sortir de cours, lorsqu'un professeur le lui demande ?», a-t-il interrogé.

Pour lui, une sensibilisation à l'usage de l'écran doit être fait, mais le vrai problème demeure l'autorité. 

De plus, afin d’être certain que les élèves ne gardent pas sur eux leur vrai téléphone après en avoir déposé un à leur arrivée au collège, il faudrait procéder à une fouille poussée - difficilement réalisable - à chaque entrée.

Pour cause, un collège peut compter jusqu'à 700, voire 800 élèves, a souligné Norman Gourrier, secrétaire générale du SNCL (Syndicat National des Collèges et des Lycées). 

Une solution qui aiderait à détecter les addictions ?

De plus, la sécurisation des appareils parfois très onéreux, laissés à l’arrivée au collège pose question. Pour cause, plusieurs membres du personnel encadrant craignent d'éventuelles pertes, casses ou vols, à l'issue desquels les parents pourraient se retourner contre l’établissement, et invoquer sa responsabilité.

Pour toutes ces raisons, le secrétaire générale du SNCL préconnise plutôt une solution qui obligerait les élèves à déposer leurs téléphones portables dans un casier, pour lequel ils auraient un cadenas, «comme pour les cartables», a-t-il comparé.

Par ailleurs, une telle «pause numérique» permettrait de perçevoir de potentiels comportements addictifs chez les élèves, à l'annonce : «En annonçant aux élèves qu'ils doivent se séparer de leur smartphones en arrivant au collège, on pourrait percevoir certaines réactions qui nous mettraient sur la voie d'une addiction aux écrans», a souligné Norman Gourrier.

insuffisante contre la violence

L’usage des téléphones portables est normalement déjà interdit depuis 2018 dans l’enceinte d’un établissement scolaire.

Mais cette mesure n’est pas toujours respectée, si l’on en croit les nombreuses photos et vidéos prises dans des écoles et postées sur les réseaux sociaux : «On peut filmer un enseignant à son insu, ou encore filmer le chaos d’une salle de classe pour le poster sur les réseaux sociaux et faire une sorte de compétition entre élèves pour savoir qui défie le plus l'autorité», a déploré Jean-Baptiste Verneuil.

La suggestion de Nicole Belloubet fait suite à plusieurs récents accès de violences entre élèves, qui ont débuté sur les réseaux sociaux avant de se terminer par de violentes altercations devant les établissements, menant parfois à la mort.

Mais face à cette violence et au harcèlement scolaire, la «pause numérique» reste insuffisante selon plusieurs syndicats : «La plupart des actions de cyberharcèlement se font généralement à l'extérieur des temps d'école», a observé Norman Gourrier. 

Le 4 avril, Shemseddine, 14 ans a été frappé à mort devant son collège à Viry-Châtillon (Essonne) et deux jours plus tôt, Samara, une jeune collégienne avait été tabassée devant son établissement scolaire à Montpellier (Hérault).

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