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Le Chinois Mo Yan reçoit le Nobel dans l'ambivalence

Le prix Nobel de Littérature Mo Yan s'installe pour une conférence de presse à l'Académie suédoise, le 6 décembre 2012 à Stockholm [Jonathan Nackstrand / AFP] Le prix Nobel de Littérature Mo Yan s'installe pour une conférence de presse à l'Académie suédoise, le 6 décembre 2012 à Stockholm [Jonathan Nackstrand / AFP]

Le romancier chinois était contraint à des contorsions politiques au moment de recevoir son prix Nobel de littérature à Stockholm, suscitant, quoi qu'il en dise, des commentaires sur son soutien ou non au régime de Pékin.

Lors d'une conférence de presse jeudi il a confirmé ce qu'il avait dit en octobre, qu'il souhaitait la libération de son compatriote prix Nobel de la paix Liu Xiaobo, emprisonné pour "subversion" après un manifeste pro-démocratie.

Mais il l'a fait sans entrain. "J'ai déjà exprimé mon opinion sur ce sujet", a-t-il déclaré, en tâchant d'éviter toutes les questions sur les droits de l'Homme en Chine de journalistes occidentaux évidemment plus intéressés par la politique que la littérature.

Mo Yan, vice-président de l'Association des écrivains chinois (officielle) et premier Chinois à recevoir le Nobel de littérature, est un héros national aux yeux de la presse gouvernementale.

A l'inverse, le prix Nobel 2010 de Liu, autre écrivain, et celui d'un dissident naturalisé français (la littérature en 2000), Gao Xingjian, ont été complètement ignorés.

Mo Yan doit prononcer son discours de la "conférence Nobel" vendredi après-midi, au lendemain d'une lettre ouverte signée par plus de 130 lauréats du prix Nobel appelant Pékin à libérer Liu.

Parmi ses prédécesseurs, le romancier chinois s'est fait des ennemis, comme la Germano-Roumaine Herta Müller qui a dit avoir pleuré quand elle a entendu que le Nobel de littérature allait, selon elle, à un auteur qui "loue la censure".

Ses déclarations sur la censure étaient donc décortiqués vendredi dans les médias.

Mo Yan a affirmé qu'elle était parfois "nécessaire", la comparant aux fouilles dans les aéroports, qu'elle existait d'ailleurs "dans tous les pays du monde, et que "la seule différence c'est le degré".

"Savoir s'il y a une liberté d'expression en Chine, c'est une question difficile", a-t-il estimé, invitant chacun à aller sur l'internet chinois pour se forger une opinion.

Le prix Nobel de Littérature Mo Yan en conférence de presse à l'Académie suédoise, le 6 décembre 2012 à Stockholm [Jonathan Nackstrand / AFP]
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Le prix Nobel de Littérature Mo Yan en conférence de presse à l'Académie suédoise, le 6 décembre 2012 à Stockholm
 

Ses mots étaient assez ambigus pour susciter des commentaires divergents.

"Quelle misère: le lauréat du Nobel Mo Yan défend la censure", titrait sur son site internet le Los Angeles Times, critique à l'instar des autres médias américains.

Pour le South China Morning Post, quotidien hong-kongais, l'écrivain "s'est refusé à lancer un appel direct à la libération de son compatriote emprisonné" Liu Xiaobo.

Mais le quotidien suédois Svenska Dagbladet lui trouvait une certaine indépendance quand il a souligné que le Nobel était une récompense "personnelle". "Il a été clair auprès des journalistes chinois sur le fait que le prix n'a pas été décerné à la Chine, où on l'utilise actuellement à des fins patriotiques", relevait le journal.

Le quotidien de Stockholm a comparé Mo Yan à un lauréat suédois, Harry Martinson (1974), critiqué dans son pays pour ne pas avoir été assez "politique". Aujourd'hui, son oeuvre "apparaît comme visionnaire. Peut-être que ce n'est qu'avec du recul qu'on peut juger si l'Académie a fait le bon choix.

Il a également donné la parole à Shelley W. Chan, Américaine auteur d'"Une voix subversive en Chine: le monde fictionnel de Mo Yan", qui reproche aux contempteurs de l'écrivain de ne pas avoir lu son oeuvre.

Selon elle, certaines de ses critiques contre le régime communiste sont très explicites, et d'autres plus allusives, comme certains passages pouvant être interprétés comme des références à la répression sanglante contre les manifestants de la place Tiananmen en 1989, dont il est quasi interdit de parler en Chine.

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