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Tunisie : les salafistes menacent

Les représentants du mouvement Ansar Ashariaa répondent aux journalistes, le 16 mai 2013 à Tunis [Hosni Manoubi / AFP]

Un mort, 18 blessés et 200 arrestations. Lundi, alors que le calme était revenu dans les rues de Tunis, le bilan des affrontements de la veille entre les autorités et les salafistes d’Ansar al-Charia ne sonnait pas comme une fin en soi, mais plus comme un début.

Le début d’une lutte entre le gouvernement du parti Ennahda, pourtant islamiste, et des fondamentalistes religieux qualifiés pour la première fois ce week-end de «terroristes».

«Ce groupe exerce la violence, s’oppose à l’Etat et se rebelle», a déclaré hier le Premier ministre Ali Larayedh dans le journal Al-Hayat, assurant que son gouvernement ferait preuve d’une «extrême fermeté».

 

La religion au-dessus de la nation

Il y a encore deux ans, les islamistes d’Ennahda voyaient les salafistes d’Ansar al-Charia comme leurs petits frères : un peu agités mais pas vraiment dangereux.

Mais d’assassinats politiques (le commissaire Mohamed Sbouï) en coups de force culturels (interdiction de films), de trafic d’armes en attentats, ils sont devenus une menace pour la démocratie tunisienne.

Passant de quelques centaines d’individus à plusieurs milliers, ils se sont définitivement mis à l’écart par leurs positions antigouvernementales.

«Ils refusent la transition politique du pays, et la politique en général, estime Pierre Vermeren, spécialiste de la région et auteur d’Idées reçues sur le monde arabe (ed. Le Cavalier Bleu). Leur objectif est d’instaurer un gouvernement religieux au-dessus des Etats-nations.»

Pas étonnant, donc, que les événements de ce week-end arrivent après qu’un accord a été trouvé entre Ennahda et les autres partis au pouvoir concernant les prochaines élections présidentielles et législatives.

 

La crainte de l’instabilité

En transition depuis plus de deux ans, suite à la chute du régime de Ben Ali, la Tunisie est une cible idéale pour les salafistes.

Pour faire capoter le processus démocratique, ils espèrent capitaliser sur la crise économique qui gangrène le pays et visent les jeunes hommes des quartiers populaires touchés par le chômage.

Financés et soutenus par des groupes du Moyen-Orient, al-Qaida en tête, ils font venir des prêcheurs pour recruter de plus en plus de fidèles. A court terme, ils devraient multiplier les actions de déstabilisation du gouvernement, notamment en représailles à la mort d’un manifestant ce week-end.

«Il est peu probable d’assister à un véritable renversement du pouvoir en place, estime Pierre Vermeren. Mais le danger repose dans le fait que de nombreuses armes circulent dans le pays et que la police n’est pas réellement formée pour les contrer.»

L’autre inquiétude, à long terme, vient de la Syrie, où des centaines de salafistes tunisiens sont partis combattre Bachar al-Assad. Le retour de ces guerriers, motivés par l’instauration de la charia, pourrait être un élément déstabilisant de plus.

La visite du ministre des Affaires étrangères français, Laurent Fabius, la semaine dernière, et celle plusieurs fois repoussée de François Hollande, ne sont donc pas de trop pour soutenir le gouvernement tunisien dans son chemin vers la démocratie.

 

Un manifestant tué à Tunis

Le rassemblement des salafistes interdit

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