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Rwanda: trois candidats pour une élection sans suspense

Paul Kagamé Paul Kagamé et ses supporters, le 2 août, jour de clôture de la campagne présidentielle[MARCO LONGARI / AFP]

6,8 millions d’électeurs rwandais sont appelés aux urnes, ce vendredi, pour élire le président des sept prochaines années.

Face au président sortant, Paul Kagame, deux candidats de l’opposition seront présents au scrutin. Pourtant, la victoire de «Kagome» («le méchant», son surnom à l’école, dû à son cynisme) fait peu de doutes tant la campagne semble déséquilibrée.

Paul Kagamé – Front patriotique rwandais

Sauveur du Rwanda. Au pouvoir depuis 2010, Paul Kagame part avec un avantage considérable : une forte notoriété, et un bilan à mettre en avant. Le candidat du Front patriotique rwandais (FPR) est en effet reconnu pour avoir redressé le pays après la guerre. En 1994, c’est le FPR qui déloge du pouvoir les Tutsis (coupables d’un génocide sur les Hutus qui a fait 800 000 morts) pour s’y installer. Paul Kagame devient alors vice-président et ministre de la défense, et prend les rênes du pays en 2000 (élection par le Parlement) avant d’être élu au suffrage universel en 2003, puis en 2010. Durant son mandat, il a fait du pays un exemple de stabilité économique, développant considérablement le tourisme et la croissance.

Peu regardant sur les droits de l’homme. La face sombre de Paul Kagame, c’est son respect relatif des droits de l’Homme. Le président sortant, qui peut se représenter grâce à un référendum, en décembre 2015, lui autorisant à briguer un nouveau mandat, est soupçonné de jouer un rôle dans les drôles de «coïncidences» de l’opposition, qui craint les menaces et les meurtres. A titre d’exemple (d’autres apparaissent dans le rapport Amnesty International), l’étrange publication sur internet de photos intimes de Diane Shima Rwigara quelques jours après que cette fille d’ancien financier du FPR ait annoncé sa candidature à la présidence. Kagame est accusé par les deux candidats de l’opposition de menacer leurs proches ainsi que les citoyens qui voudraient venir les écouter en meetings, rendant la campagne sur le terrain impossible.

Programme. Niveau promesses, le FPR entend se centrer sur la poursuite du développement économique du pays, et espère amener à l’autosuffisance, au bien-être social, ainsi qu’à la justice.

Citation. «Ce serait mentir que de prétendre ignorer le résultat de l'élection présidentielle. Je suis venu vous demander si vous êtes encore sur la voie de ce qui a conduit au référendum et à ses résultats. Si c'est le cas, vous comprendrez que l'élection est jouée»

Frank Habizena – Parti vert démocratique

Transfuge. Ancien du FPR, Frank Habineza a fondé le Parti vert démocratique (PVD) en 2009 afin de créer une opposition écologique et démocratique au parti présidentiel. Le parti n’a été reconnu par les autorités rwandaises qu’en 2013, et n’a donc pas pu participer à l’élection 2010, à quelques jours de laquelle le vice-président du mouvement, André Kagwa Rwisereka, a été décapité sans que son meurtre n’ait jamais été élucidé. Ce scrutin présidentiel sera le premier pour le parti.

Manque de moyens. Malgré plusieurs années de militantisme qui ont servi sa notoriété, Frank Habineza se fait peu d’illusions sur ses chances à l’élection. Les financements étrangers étant interdit lors de la présidentielle rwandaise, il doit se contenter des moyens du bord qui, s’ils lui permettent de tenir tête au troisième homme, Philippe Mpayimana, sont bien loin des moyens de Kagame, accusé d’utiliser l’argent de l’Etat pour financer sa campagne.

Programme. Le PVD, qui s’était opposé à la réforme de 2015 permettant à Kagame de briguer un nouveau mandat, cible la jeunesse rwandaise et les dissidents du parti au pouvoir. Habineza a déclaré vouloir placer l’emploi au cœur de son projet, et a également parler de fermer tous les centres de détention illégaux, «où sont enfermés tous ceux qui restent plus de trois mois en détention, sans qu’il n’y ait aucun dossier pour la justifier». Dénonçant les inégalités économiques entre la capitale Kigali et les campagnes rwandaises, il entend réduire les taxes écrasant les plus précaires.

Citation. «Je suis entré en politique parce que j'avais un désir ardent de provoquer des changements démocratiques et favoriser la liberté d'expression et d'assemblée politique au Rwanda. J'ai également une passion pour les problèmes environnementaux et je voulais apporter ma contribution là aussi»

Philippe Mpayimana – Indépendant

Manque de notoriété. Philippe Mpayimana est quasiment inconnu au Rwanda. Cet homme de 46 ans a quitté le pays en 1994 pour fuir vers la République démocratique du Congo avec des centaines de milliers de Hutus fuyant le putsch Tutsi. Depuis, il a vécu au Congo Brazzaville, au Cameroun, puis en France, où il a travaillé comme journaliste, avant de rentrer d’exil en février.

Programme. Philippe Mpayimana, journaliste de profession, souhaite rétablir la liberté d’expression dans le pays (notamment pour l’opposition), et «laisser s’exprimer ceux qui connaissent des difficultés». Il considère que les grands capitaux sont trop proches du pouvoir, et les petites entreprises et bas revenus sont laissés pour compte.

Citation. «Mon pays souhaite verser dans le monopartisme, donc je souhaite qu’il y ait beaucoup plus de libertés politiques. Il faut essayer de libérer ceux qui sont en prison et de montrer qu’on peut faire de la politique sans détruire ou menacer de guerre». 

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