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En Turquie, le coronavirus bouleverse les rites funéraires

Des personnels funéraires en combinaison de protection enterrent une personne décédée du coronavirus en présence de la famille, le 21 mai 2020 à Istanbul, en Turquie [BULENT KILIC / AFP] Le coronavirus a fait plus de 4.200 morts en Turquie. [BULENT KILIC / AFP]

«En temps normal, quelque 200 personnes seraient venues pour les funérailles», soupire Ahmet Ucukcu, entouré d'une poignée de proches autorisés à assister à l'enterrement de son père dans un cimetière d'Istanbul, où, comme ailleurs en Turquie, le coronavirus a bouleversé les rites funéraires.

Plus de 700 personnes décédées du Covid-19 ont à ce jour été enterrées dans ce cimetière spécialement aménagé en mars comme lieu de sépulture pour les victimes des maladies contagieuses, dans le district de Beykoz sur la rive asiatique d'Istanbul.

Le père d'Ahmet, Ali, qui souffrait de comorbidités, est décédé à l'âge de 95 ans, après dix jours d'hospitalisation.

Rassemblés autour de la tombe, Ahmet Ucukcu et un petit groupe de parents, portant tous des masques, récitent des versets du Coran après que le cercueil renfermant le corps du nonagénaire a été introduit dans la fosse.

«Beaucoup de proches n'ont pas pu venir, seuls ses enfants et les parents de premier degré ont été autorisés, soit six ou sept personnes», explique M. Ucukcu.

Des personnels funéraires en combinaison de protection préparent le corps d'une personne décédée du coronavirus à la morgue du cimetière d'Istanbul, le 21 mai 2020 en Turquie [BULENT KILIC / AFP]
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Des personnels funéraires en combinaison de protection préparent le corps d'une personne décédée du coronavirus à la morgue du cimetière d'Istanbul, le 21 mai 2020 en Turquie

 

Avant d'être transporté au cimetière dans un corbillard, la dépouille d'Ali Ucukcu a été lavée à la morgue selon les rituels de toilette funéraires musulmans par des employés en tenue de protection, avant d'être mise en linceul.

Le cercueil a ensuite a été placé sur un banc en bois dans la cour de la morgue où les proches, se tenant à bonne distance l'un de l'autre, ont accompli la prière funéraire collective.

Des personnels funéraires en combinaison de protection préparent le corps d'une personne décédée du coronavirus à la morgue du cimetière d'Istanbul, le 21 mai 2020 en Turquie [BULENT KILIC / AFP]
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Des personnels funéraires en combinaison de protection préparent le corps d'une personne décédée du coronavirus à la morgue du cimetière d'Istanbul, le 21 mai 2020 en Turquie

 

Ces rites sommaires, sans prière de la mort à la mosquée et avec un nombre limité de proches au cimetière, sont devenus obligatoires dans le cadre des mesures mises en place par les autorités turques pour lutter contre la propagation du coronavirus, qui a fait plus de 4.200 morts dans le pays.

Plus de veillées funéraires

Les rassemblements ayant aussi été interdits, les traditionnelles veillées funéraires lors desquelles la famille du défunt reçoit les condoléances, ne peuvent avoir lieu non plus.

«Un virus qu'on ne peut voir qu'au microscope a tout bouleversé dans le monde, les usages, les traditions et les cérémonies funéraires. Même la mort a changé», souligne Ayhan Koc, qui dirige le département des cimetières à la municipalité d'Istanbul, une ville de près de 16 millions d'habitants.

Des personnels funéraires en combinaison de protection enterrent une personne décédée du coronavirus en présence de la famille, le 21 mai 2020 à Istanbul, en Turquie [BULENT KILIC / AFP]
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Des personnels funéraires en combinaison de protection enterrent une personne décédée du coronavirus en présence de la famille, le 21 mai 2020 à Istanbul, en Turquie

 

Au cimetière de Beykoz, une femme et ses deux filles sont venues se recueillir sur la tombe du père de famille décédé la semaine dernière à 76 ans. S'ils cachent une partie de leur visage, les masques qu'elles portent mettent en évidence leurs yeux embués de larmes.

«Les mosquées sont fermées à cause de la pandémie. Nous ne pouvons pas enterrer nos morts comme nous le voulons», confie Filiz, l'une des filles du défunt. «Seulement six personnes ont pu participer à la prière funéraire, ce n'est pas ce que nous voulions».

Même si les parents ne peuvent plus se séparer pour la dernière fois de leurs proches comme ils l'auraient souhaité, les restrictions en place ont été acceptées «sans objections», explique M. Koc, le responsable municipal en charge des cimetières.

Quelques membres de la famille se recueillent devant la tombe d'un proche décédé du coronavirus au cimetière d'Istanbul, le 21 mai 2020 en Turquie [BULENT KILIC / AFP]
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Quelques membres de la famille se recueillent devant la tombe d'un proche décédé du coronavirus au cimetière d'Istanbul, le 21 mai 2020 en Turquie

 

«L'objectif est d'éviter que des foules se forment et que la distanciation sociale soit respectée. Avec le temps, les citoyens s'habituent et de moins en moins de gens assistent aux funérailles», affirme-t-il.

Selon les rites musulmans, le corps doit être inhumé enroulé dans un linceul sans être placé dans un cercueil comme c'est actuellement le cas.

M. Koc explique que la mise en terre dans un cercueil vise à faciliter l'éventuel transfert de la dépouille vers un autre cimetière puisque les personnes décédées à Istanbul y sont obligatoirement enterrées actuellement en raison des restrictions de circulation en place, même si elles sont originaires d'autres villes.

Cengiz Aktas, a assisté seul à l'enterrement de sa grand-mère maternelle, Faize Kilic, emportée à 85 ans par le coronavirus.

«Personne d'autre ne pouvait participer. Ma mère ne peut pas quitter la maison en raison du confinement imposé aux plus de 65 ans», regrette-il. «Cette maudite maladie nous empêche même d'accomplir une propre prière funéraire à la mosquée».

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