En direct
A suivre

Brexit : où en sont les négociations, qui reprennent ce mardi ?

Les négociations patinent à cause de divergences sur la pêche et les conditions de concurrence équitable. Les négociations patinent à cause de divergences sur la pêche et les conditions de concurrence équitable. [Daniel LEAL-OLIVAS / AFP]

Après avoir été éclipsé par la pandémie de coronavirus ces derniers mois, il revient sur le devant de la scène. Le Brexit, interminable feuilleton euro-britannique, a droit à un nouveau round de négociations cette semaine, à Londres, à partir de ce mardi 8 septembre. A 114 jours de la fin de la période de transition, les discussions pour trouver un accord de libre-échange sont dans l'impasse, faisant craindre un «no deal».

Pourquoi parle-t-on encore du Brexit ?

Le 31 janvier dernier, près de quatre ans après le référendum sur la sortie de l'UE et au bout de négociations complexes, le Royaume-Uni quittait officiellement le club européen. Même si le divorce était acté, il restait à régler les nombreux détails régissant la future relation entre Londres et Bruxelles, notamment commerciale. Une période de transition était donc prévue dans le traité de retrait, qui s'est ouverte le 1er février, durant laquelle les liens entre les deux parties sont restés - et restent toujours aujourd'hui - quasiment inchangés. Sept mois et sept sessions de négociations plus tard, les tractations visant à trouver un accord de libre-échange euro-britannique patinent.

Pourquoi ça coince ?

Les discussions achoppent sur deux points en particulier : la pêche et les conditions de concurrence. Sur le premier, «les Européens veulent un statu quo», explique Christian Lequesne, professeur à Sciences Po et spécialiste des questions européennes. Concrètement, ils souhaitent que les pêcheurs européens puissent continuer à avoir accès aux eaux britanniques, très poissonneuses. Ce à quoi s'oppose le gouvernement britannique, qui veut réserver en priorité ses eaux territoriales à ses ressortissants. «Il n’y aura pas d’accord commercial (…) sans un accord durable et équilibré sur la pêche», a récemment prévenu Michel Barnier, le négociateur européen pour le Brexit.

D'autre part, en échange d'un accès sans entrave au marché européen, Bruxelles demande à ce que le Royaume-Uni reste aligné sur certaines normes communautaires, en matière de droits des travailleurs, de régulations environnementales, mais aussi et surtout d'aides d'Etat aux entreprises. Une façon pour l'UE de garantir une concurrence équitable. Londres rejette en bloc cette exigence, expliquant justement que tout le but du Brexit était de s'affranchir des règles européennes.

Pourquoi le temps presse ?

Pour pouvoir entrer en vigueur à temps, c'est-à-dire dès le 1er janvier 2021, un accord commercial post-Brexit doit être trouvé «d'ici au Conseil européen le 15 octobre», a affirmé Boris Johnson ce lundi, ajoutant que les négociations avec l'UE entraient cette semaine dans leur «phase finale». Du côté européen, Michel Barnier a fixé la deadline à fin octobre. Il faudra ensuite laisser le temps aux parlements européen et britannique d'examiner le texte et de le ratifier. Ce qui ne laisse plus qu'entre six et huit semaines de travail aux négociateurs pour se mettre d'accord.

Un accord est-il encore possible ?

Les déclarations des uns et des autres n'invitent pas à l'optimisme sur la possibilité d'un accord. Côté européen, Michel Barnier a déploré la semaine dernière que le Royaume-Uni ne montre «aucune volonté de rechercher des compromis», tandis que le ministre des Affaires étrangères français Jean-Yves Le Drian a fustigé fin août «l'attitude intransigeante et irréaliste» de Londres.

Chez les Britanniques, on hausse le ton contre l'Union européenne, tout en n'excluant pas un «no deal». Dans une interview au Mail on Sunday, David Frost, le négociateur britannique du Brexit, a averti dimanche que le Royaume-Uni ne deviendrait pas «un Etat vassal» de l'UE et affirmé que l'exécutif britannique n'avait pas «peur» d'un Brexit sans accord. Boris Johnson est sur la même longueur d'onde. Le Premier ministre a déclaré lundi que si aucun accord ne pouvait être conclu, «il faudra l'accepter et passer à autre chose», assurant que son pays pourrait malgré tout «prospérer».

Par ailleurs, un compromis sur la relation future n'est pas encore trouvé que Londres remet déjà en cause l'accord encadrant sa sortie, scellé en octobre dernier avec l'UE. Selon des informations du Financial Times, le gouvernement britannique va présenter ce mercredi un projet de loi qui «éliminerait» la portée juridique de certaines dispositions du texte, dont celles prévues en Irlande du Nord destinées à éviter le retour d'une frontière physique entre la province britannique et son voisin irlandais. Downing Street a précisé qu'il s'agissait seulement de mesures «limitées» visant à «clarifier» le protocole sur l'Irlande du Nord.

Mais cette décision pourrait provoquer une rupture de confiance avec l'Union européenne, en pleines tractations sur la relation post-Brexit. «On peut se demander si politiquement les conservateurs au pouvoir n'ont pas fait le choix du "no deal"», imagine même le politologue Christian Lequesne, pour qui le gouvernement britannique n'est préoccupé que par son «idéologie de reprendre le contrôle», qui était le slogan des Brexiters durant la campagne pour le référendum («Take back control»).

Et s'il n'y a pas d'accord ?

En cas d'absence d'accord, le très redouté «no deal», évité au prix de trois reports du Brexit l'an dernier, deviendrait réalité le 1er janvier 2021. Concrètement, le Royaume-Uni deviendrait un pays tiers pour l'Union européenne et les seules règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) s'appliqueraient entre les deux parties.

Droits de douane élevés, quotas, contrôles douaniers poussés, paperasserie administrative... Les entreprises exportatrices des deux côtés de la Manche seraient touchées de plein fouet, bien que ce soit Londres qui ait le plus à perdre : le Royaume-Uni réalise près de la moitié de ses exportations vers l'Union européenne (47 %), quand cette dernière n'envoie que 8 % de ses produits outre-Manche.

Avec le retour des contrôles douaniers, la fédération britannique des transporteurs routiers craint de son côté de «graves» perturbations dans les chaînes d’approvisionnement, anticipant des embouteillages monstres autour des ports et du tunnel sous la Manche. Pour éviter ce chaos, le gouvernement britannique a autorisé la construction en urgence de 29 parkings géants réservés aux poids lourds, dans le sud de l'Angleterre. 

Retrouvez toute l'actualité sur le Brexit ICI

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités