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Royaume-Uni : une chirurgienne sur trois dit avoir été victime d'agression sexuelle au travail

D'après l'étude, ces harcèlements et agressions sont favorisés par «la combinaison d'une structure profondément hiérarchique et d'un déséquilibre entre les sexes et les pouvoirs». [Mahmoud ZAYYAT / AFP]

Selon une étude publiée mardi au Royaume-Uni, 30% des chirurgiennes britanniques ont été victimes d'agression sexuelle sur leur lieu de travail. Les auteurs dénoncent une «culture du silence».

Les chirurgiennes britanniques subissent la «normalisation de comportements inacceptables», selon une étude publiée ce mardi 12 septembre dans le British Journal of Surgery. Elle révèle qu'au Royaume-Uni, un tiers (29,9%) de ces professionnelles ont été agressées sexuellement par un collègue masculin ces cinq dernières années.

Au total, 1.434 personnes du milieu de la chirurgie, autant d'homme que de femmes, ont participé à cette enquête commandée par un groupe de travail sur les comportements sexuels inappropriés dans la chirurgie et réalisée par les universités d'Exeter et du Surrey.

Au moins 11 cas de viols ont été recensés au cours de l'étude et plus de 63% des femmes interrogées ont dit avoir été l'objet de harcèlement sexuel, contre 24% des hommes. Près de 90% des premières et 81% des seconds ont été témoins de telles situations, tandis que 11% des chirurgiennes ont subi «des contacts physiques forcés» en lien avec des opportunités de carrière.

Globalement, les résultats de l'étude montrent que «le harcèlement sexuel et les agressions sexuelles peuvent être monnaie courante dans le milieu chirurgical britannique et que le viol existe». Estimant assister au «moment MeToo de la chirurgie», Tamzin Cuming, présidente du Forum des femmes en chirurgie, a appelé à «commencer le vrai travail pour un changement profond».

Après la publication de l'étude, certaines victimes ont pris la parole. Judith, qui a souhaité restée anonyme, a notamment raconté à la BBC avoir été agressée au début de sa carrière. Dans la salle d'opération, un chirurgien qui transpirait a soudainement enfoui sa tête entre ses seins.

«Je me sentais sale et humiliée»

«J'ai réalisé qu'il s'essuyait le front sur moi» a relaté la chirurgienne qui se souvient s'être «figée». Lorsque son collègue l'a agressée une seconde fois, elle lui a proposé une serviette mais l'intéressé lui a répondu «non, c'est beaucoup plus sympa ainsi», sans que personne ne réagisse autour. «Il n'était même pas la personne la plus expérimentée de la salle d'opération mais il savait que ce comportement serait accepté [...] Je me sentais sale et humiliée», a témoigné Judith.

D'après l'étude, ces harcèlements et agressions sont favorisés par «la combinaison d'une structure profondément hiérarchique et d'un déséquilibre entre les sexes et les pouvoirs».

La professeure Carrie Newlands, membre de l'université du Surrey et qui a participé à l'étude, explique que «le scénario le plus commun est celui d'une jeune interne agressée par un auteur plus vieux, qui est souvent son supérieur direct». Cela mène selon elle «à une culture du silence, où les gens ont peur pour leur futur et leur carrière s'ils disent quelque chose».

Au Royaume-Uni, seuls 15% des chirurgiens les plus haut gradés sont des femmes et ces dernières représentent moins de 30% de la profession. Pour les auteurs de l'enquête, il paraît évident que «les femmes et les hommes qui travaillent dans le secteur de la chirurgie vivent des réalités différentes».

L'ordre britannique des chirurgiens a réagi à cette publication, jugeant ces révélations «véritablement choquantes». S'appuyant sur les chiffres, le président du Royal College of Surgeons, Tim Mitchell, a estimé qu'il était «clair qu'il s'agit d'un problème courant» et a appelé à «mettre en place une culture de tolérance zéro pour garantir qu'il existe des mécanismes permettant aux victimes de signaler ces incidents en sachant qu'elles seront prises au sérieux».

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