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Iran : un an après la mort de Mahsa Amini, «les réseaux sociaux bouillonnent de rage contre le régime»

Selon Mahnaz Shirali, «le débit internet a été ralenti ces derniers jours» en Iran, pour «empêcher les gens de communiquer et de s'organiser» à l'approche de l'anniversaire de la mort de Mahsa Amini. [Kenzo TRIBOUILLARD / AFP]

Ce samedi 16 septembre marque le premier anniversaire de la mort de Mahsa Amini, source d'importantes manifestations en Iran l'an dernier. La sociologue et politiste Mahnaz Shirali explique à CNEWS que la colère populaire est toujours vive aujourd'hui.

Un an après, son nom fait encore battre le coeur de tous les Iraniens. Mahsa Amini, 22 ans, est morte le 16 septembre 2022, trois jours après avoir été arrêtée par la police des moeurs qui lui reprochait de ne pas respecter le code vestimentaire imposé aux femmes en Iran. Son histoire avait déclenché un soulèvement populaire brûlant, porté par le mouvement «Femme, Vie, Liberté» et durement réprimé par le régime.

Plusieurs centaines d'Iraniens, dont des membres des forces de l'ordre, ont été tués et des dizaines de milliers ont été arrêtés lors des protestations d'octobre et novembre 2022. Depuis, les manifestants n'investissent plus les rues en masse mais, à l'occasion de l'anniversaire de la mort de Mahsa Amini, il y a toujours «du feu sous la cendre» selon Mahnaz Shirali, sociologue et politiste spécialiste de l'Iran.

Les femmes étaient au coeur de la mobilisation qui a suivi la mort de Mahsa Amini, un an après qu'est-ce qui a changé pour elles ?

Les femmes ont pris beaucoup de confiance, elles bravent le danger et sortent la tête nue, sans voile. On voit aussi de plus en plus de femmes cyclistes ou à moto, alors que ça leur est interdit. Ça montre qu'elles sont courageuses, tous les jours elles se battent pour obtenir leur liberté.

Plus largement, dans l'année écoulée, on a vu un changement de comportement de toute la population. Avant quand on recevait des témoignages ou des vidéos qui montraient des scènes de violence, on constatait souvent que les autres Iraniens n'intervenaient pas. Maintenant, dès que la police s'approche d'une femme, lui demande de mettre son foulard ou la violente, les hommes viennent en aide. Ils ne restent pas observateurs.

Que représente Mahsa Amini aujourd'hui pour les Iraniens ?

Mahsa Amini, c'est la fille de l'Iran. Souvent, dans les médias, on précise qu'elle était Kurde, et c'est vrai. Mais en Iran, vous pouvez être Kurde, Turc ou Lor, l'identité nationale passe avant tout autre identité. Tout le pays a porté cette jeune femme. Des histoires comme la sienne il y en a eu d'autres avant, mais Mahsa Amini a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.

«La République islamique a peur des familles des victimes et surtout des mères.»
Mahnaz Shirali

L'opposition au régime est-elle toujours vive, même si les manifestations sont terminées ?

Bien sûr, les réseaux sociaux bouillonnent de rage contre le régime. Les Iraniens se réunissent tous les jours pour parler, dénoncer, crier. Toutes les décisions du régime sont critiquées. Les jeunes notamment sont très en colère.

Il faut comprendre que ceux qui s'opposent jouent avec leur vie. On les tue, on n'arrête pas de les tuer. Pas plus tard qu'il y a une semaine, un jeune homme qui a dansé devant une voiture de police a été tué en prison, sous la torture.

Le régime craint-il de nouvelles manifestations pour l'anniversaire de la mort de Mahsa Amini ?

Le débit internet a été ralenti ces derniers jours, pour empêcher les gens de communiquer et de s'organiser. La présence policière est très forte et, au sein des familles des victimes des manifestations de 2022, beaucoup de membres ont été emprisonnés pour les empêcher d'entraîner d'autre Iraniens dans leur combat.

La république islamique a peur de ces familles et surtout des mères. En Iran, il y a un mouvement des mères qui pleurent la mort de leurs enfants et le régime ne parvient pas à les maîtriser parce qu'elles n'ont plus rien à perdre, elles ont déjà perdu ce qu'elles avaient de plus cher. Beaucoup d'entre elles ont été emprisonnées à l'approche de cet anniversaire.

Les parents de Mahsa Amini eux-mêmes ont été menacés par le régime qui leur a interdit de se rendre sur la tombe de leur fille samedi. On leur a également demandé de lancer un appel au calme, pour éviter les manifestations. Ils sont hautement surveillés mais ils ont répondu qu'ils se recueilleraient et que si d'autres Iraniens voulaient en faire autant, ils n'avaient pas le pouvoir de les en empêcher.

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