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Ce qu'il faut retenir du débat à onze

Il s'agissait du premier débat à onze de l'élection. [Lionel BONAVENTURE / POOL / AFP]

Première dans l'histoire des élections françaises, le débat télévisé réunissant la totalité des onze candidats à la présidentielle a été mis en effervescence mardi 4 avril par l'offensive parfois déroutante des six «petits» postulants qui ont permis de souligner davantage les lignes de fracture.

Quinze jours après un premier débat pugnace sur TF1 entre les cinq «grands» - Marine Le Pen, Emmanuel Macron, François Fillon, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon -, les six autres candidats les ont rejoints, cette fois sur les chaînes info BFM TV et CNews : Nicolas Dupont-Aignan (DLF), Philippe Poutou (NPA), Nathalie Arthaud (LO), François Asselineau (UPR), Jean Lassalle et Jacques Cheminade.

Nombreuses piques

Soucieux de détoner pour ce rare moment de large exposition, ceux-ci ont marqué leurs différences, à l'image d'un Nicolas Dupont-Aignan particulièrement cinglant envers François Fillon, directement ou plus indirectement, en lançant en préambule : «j'ai toujours servi les Français sans jamais me servir».

La voix rocailleuse de Jean Lassalle rappelant qu'il était «fils de berger, frère de berger», la sortie acide contre les «politiciens corrompus» de Philippe Poutou, les flèches décochées par Nathalie Arthaud, dans «le camp des travailleurs» contre «le grand patronat», ainsi que «l'indépendance de la France», mantra de François Asselineau, ont donné de la couleur au débat, contrastant avec Marine Le Pen et Emmanuel Macron, favoris sans éclat.

Ce débat rythmé n'a toutefois pas échappé aux moments de confusion, aux interruptions brutales et à quelques déclarations incongrues. Les échanges se sont ainsi rapidement animés autour du thème de l'Europe, où les lignes de fracture entre les candidats se sont nettement dessinées entre les tenants du renforcement de la construction européenne (M. Macron), ceux plaidant pour la renégociation des traités (MM. Mélenchon, Hamon) et ceux demandant un «Frexit» et/ou la sortie immédiate de l'euro (Mme Le Pen, M. Asselineau...).

Passe d'armes sur les travailleurs détachés

Sur ce thème, Marine Le Pen a ainsi raillé les «veilles badernes» d'Emmanuel Macron et la question de la suppression ou non de la directive européenne sur les travailleurs détachés a donné lieu à une passe d'armes entre Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron et Nicolas Dupont-Aignan qui a lancé le sujet.

«C'est inacceptable que des personnes qui viennent de Roumanie, de Pologne, d'Espagne et ne payent pas les charges sociales, quand nos artisans, nos indépendants les payent», s'est indigné le candidat de Debout La France. «On oublie de dire à chaque fois qu'il y a près de 300.000 Français qui sont travailleurs détachés. Donc vous irez leur expliquer les uns et les autres que dès demain c'est fini pour eux», a répliqué M. Macron, face à M. Mélenchon et Mme Le Pen.

Entre les éclats de voix, François Fillon s'est montré plutôt effacé. Durant sa minute de présentation, il s'est posé en candidat du «redressement» qui «devra restaurer la fierté nationale et se tenir aux côtés des Français qui réclament de l'ordre et de la sécurité». Il a toutefois répliqué aux attaques de M. Dupont-Aignan en rappelant que quand «il l'a connu, (il était) chef de cabinet de François Bayrou» au ministère de l'Education en 1993.

Quant à Benoît Hamon, le socialiste se veut «un président qui sait pour qui il se bat», «honnête, combattant, humain». En hausse dans les sondages, Jean-Luc Mélenchon s'en est lui pris à «la finance», qui «doit rendre l'argent» et «payer le retour au plein emploi», en se disant «prêt à gouverner».

Fillon et Le Pen ciblés par Poutou

Si le thème du terrorisme a permis à chacun de dérouler des points attendus du programme, celui de l'exemplarité en politique a permis de rediriger les piques vers François Fillon et Marine Le Pen, à l'image d'un Philippe Poutou particulièrement en verve. «Quand nous on est convoqués par la police, on n'a pas d'immunité ouvrière, donc on y va», a-t-il lancé à Marine Le Pen, qui a refusé de se rendre à une convocation chez le juge d'instruction dans l'enquête sur les soupçons d'emplois fictifs d'assistants du FN au Parlement européen.

«C'est assez amusant de vous voir jouer les victimes», a encore moqué M. Hamon à l'adresse de la présidente du FN, qui s'estime «persécutée politiquement». Quant à M. Fillon, qui a livré dans une anaphore sa définition d'un «président exemplaire» où il a attaqué le sortant François Hollande, il a été renvoyé par Mme Arthaud au «décalage insupportable» entre son cas et celui des contrôles visant les chômeurs ou les personnes en congé maladie. Et a ferraillé avec M. Hamon pour défendre la suppression de 500.000 postes de fonctionnaires.

Durant quatre heures, avec des candidats à la fatigue visible en arrivant aux conclusions, ce débat pourrait être le dernier à onze. Un autre est programmé sur France 2 le 20 avril, à trois jours du premier tour, mais plusieurs candidats et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ont exprimé des réserves sur cette date. Jugeant le débat «de bonne qualité», M. Dupont-Aignan a demandé aux dix autres candidats de s'engager à être présents dans deux semaines, sans que la perche soit saisie.

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