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Running : à quoi ressembleront les chaussures de demain portées par «Monsieur et Madame tout le monde» ?

Avec un chiffre d'affaires évalué autour de 500 millions d'euros en France, le secteur des chaussures de running a le vent en poupe depuis plusieurs années. [Icon Sport]

Durables et écologiques, les chaussures de running du «coureur du dimanche» de demain feront la part belle à une nouvelle génération de mousse associée au nylon ou au carbone située dans la semelle intermédiaire. CNEWS a recueilli les témoignages de différents acteurs du secteur.

Avec un chiffre d'affaires évalué autour de 500 millions d'euros en France, le secteur des chaussures de running a le vent en poupe depuis plusieurs années. Tout porte à croire que cette tendance semble partie pour durer, notamment avec l'engouement lié aux JO 2024 à Paris qui permettront à des athlètes amateurs d'emprunter le même parcours que les athlètes olympiques. Ce qui pousse, fort logiquement, les mastodontes du marché (Nike, Adidas, New Balance, Asics, Saucony, etc...) à investir dans la recherche de l'innovation idoine susceptible de satisfaire le maximum de clients. A ce titre, les technologies du futur font partie intégrante de cette course effrénée.

A l'étude depuis plusieurs années déjà chez les principales marques du running, plusieurs d'entre elles, jouant pour l'une sur le dynamisme et pour l'autre sur le confort, sont en train de tirer leur épingle du jeu et pourraient voir leur présence se renforcer dans les produits destinés au grand public. Ainsi, la mousse, élément essentiel de la semelle intermédiaire qui cristallise la concurrence des acteurs du secteur (partie invisible située au dessus de la semelle d'usure), vient de connaître une petite révolution.

de NOUVELLES mousses QUI PROMETTENT

«Une nouvelle génération de mousse fait fureur, elle consiste à injecter dans la semelle intermédiaire de l'azote à de l'EVA, du Pebax ou d'autres types de matériaux tenus secrets et développés par les laboratoires des équipementiers. Ce procédé apporte de la stabilité et du dynamisme pendant la course. C'est incontestablement la mousse du futur, toutes les marques s'y mettent», analyse Jérémy Marchetti, membre du conseil d'administration chez Running Conseil, l'un des poids lourds de la vente de chaussures de course à pied en France.

Un avis partagé par Eddy Ferhi, directeur marketing chez Asics France. «Avant, on arrivait à avoir des mousses légères mais qui s'affaissaient très vite. On a réussi à conserver cette légèreté tout en les rendant plus dynamiques et durables dans le temps. Les capacités de rebond et d'amorti sont stimulées, c'est bluffant», décrypte-t-il. De ce point de vue, il y a fort à parier que les équipementiers vont jouer des coudes et multiplier les développements techniques en interne, pour associer des molécules toujours plus légères et trouver le meilleur compromis.

La venue de ces nouvelles mousses va de pair avec la présence de plus en plus renforcée, dans les rayons, d'autres matériaux, le carbone et le nylon, composant le reste de la semelle intermédiaire. «Le nerf de la guerre c'est l'association mousse/carbone ou mousse/nylon», confirme Michel Schoeny, directeur Marketing chez Saucony.

Véritable booster de chronos qui bouscule le monde du running, le carbone, au coeur de tous les fantasmes, reste néanmoins pour l'heure réservé à une certaine élite. «C'est certes un segment non-négligeable mais ce n'est pas encore la chaussure recherchée en premier par les runners "du dimanche"», atteste Emmanuel Vial, directeur général du groupe I-RUN. «Pour le moment, je dirais que les plaques de carbone sont surtout adaptées à des athlètes de très haut niveau valant moins de 3h au marathon», abonde Guillaume Meyzenq, vice-président Footwear chez Salomon.

Le nylon plutôt que le carbone ?

Pour en connaître la raison, il faut se pencher sur les caractéristiques propres du carbone. «C'est un matériau rigide et pour en tirer un véritable renvoi d'énergie mieux vaut avoir une attaque avant ou medio-pied et une biomécanique quasi parfaite. Alors que le nylon, plus souple, convient davantage aux coureurs attaque talon», abonde Michel Schoeny, directeur marketing chez Saucony.

«Surtout, le nylon a une véritable absorption des chocs», pousse Jean-Luc Guer fondateur de la marque Wizwedge, ex-bureau d'étude fort d'une expertise d'une dizaine d'années dans l'innovation sport-santé. «Certes le carbone est l'élément le plus dynamique aujourd'hui mais une chaussure ne se résume pas qu'à la semelle intermédiaire, c'est un assemblage de différents éléments. A l'heure actuelle, pour Monsieur et Madame Tout le monde, le nylon, c'est parfait», synthétise Jérémy Marchetti.

Altra, chantre du 0 drop

Côté drop, les Marseillais de Wizwedge offrent là encore un son de cloche différent. «Loin du standard habituel de 8mm, nous proposons des drops forts compris entre 15 et 20 mm. Avec cette configuration anatomique, il n'y a aucune nocivité fonctionnelle, le runner court à l'économie», explique Jean-Luc Guer.

L'équipementier américain Altra s'inscrit lui aussi à rebours du discours dominant. «On prône le 0 drop, soit une hauteur égale de la semelle des métatarses jusqu'au talon. Cela génère une biomécanique plus équilibrée entre les chaînes musculaires antérieures et postérieures. La conséquence immédiate, c'est que l'on va moins talonner, il y aura moins de chocs. On courra en plus petites foulées, c'est une posture bénéfique», analyse Franck Le Mouillour patron d'Altra France. Toujours à contre-pied, Altra a developpé également un fit ergonomique conférant à ses chassures une forme quasi rectangulaire inhabituelle. «Le chaussant (ndlr : la forme intérieure de la chaussure) reprend la forme naturelle du pied humain. Les orteils derniers ont plus de place à l'avant, ne sont pas compressés».

Autre critère qui pourrait à l'avenir s'avérer déterminant pour les coureurs à pied, la modulation de la chaussure. C'est le parti pris de Wizwedge. «Nous avons créé un procédé permettant aux coureurs de modifier les propriétés de la semelle intermédiaire, rien qu'en glissant leur main dans la chaussure. On passe ainsi d'un produit antivibratoire, facilitant le drainage et inhibant les ondes de choc (type séance sortie longue), à un amorti plus dynamique, renvoyant davantage d'énergie (type séance VMA)». Du 2 en 1 qui d'un point de vue économique pourrait s'avérer déterminant dans le choix porté par les runners.

«Raidlight a fait cela il y a dix ans, cela a été un flop», nuance Jérémy Marchetti qui privilégie une approche différente de la customisation. «On pourrait analyser la morphologie du client avec un scanner 3D, et adapter ainsi des paramètres aussi importants que le drop ou la densité de mousse. La chassure serait disponible sous quinze jours», explique-t-il. Salomon avait lancé un temps une idée dans la même veine, incarnée par son programme Mesh, que la marque savoyarde a finalement abandonné.

Dernier point et non des moindres, la chaussure de running du futur se doit d'être un modèle d'écoresponsabilité, un constat que partagent tous les équipementiers. «Chez Asics, cela fait longtemps qu'on a intégré que le compromis technologie/préservation de la planète serait l'un des enjeux du futur. A ce titre, nos mousses sont fortement empreintes de matériaux de recyclage, idem pour nos mesh. Asics a vite pris consience de l'intérêt qu'il existe à travailler sur les modes de production, de livraison et d'acheminent pour réduire l'empreinte carbone de la planète», confirme Eddy Ferhi.

L'écoresponsabilité, un enjeu majeur

«Les matières actuelles sont difficilement recyclables. Chez Salomon, on a fait le choix d'utiliser des matières thermoplastiques pour confectionner nos semelles. Une fois la chassure usée, on propose aux consommateurs de la récupérer. On la coupe alors en deux. La partie polyester (mesh) est recyclée et sert à confectionner des vêtements. L'autre partie est transformée en petites graines qui servent à fabriquer nos chaussures à ski», détaille Guillaume Meyzenq.

La donne est identique chez Saucony. «Nos modèles sont en grande partie écoconçues. Par exemple, notre Endorphine Elite est vegan. En septembre 2023, nous sortirons notre nouvelle Triumph RFG en matériaux écoresponsables. L'empeigne sera composée de fils recyclés à base de plantes. La semelle intermédiaire sera consituée à 55% de fibres de maïs et la semelle extérieure fabriquée à 80% de caoutchouc fait à partir de matières recyclées», promet d'ores et déjà Michel Schoeny.

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