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Julien Fébreau : «Les victoires en Formule 1 vont être plus disputées cette saison»

Julien Fébreau a hâte de voir et savoir si Mercedes, Ferrari et McLaren seront capables de combler l'écart avec Red Bull. Julien Fébreau a hâte de voir et savoir si Mercedes, Ferrari et McLaren seront capables de combler l'écart avec Red Bull. [Johnny Fidelin/Icon Sport]

A moins d’un mois du premier Grand Prix à Bahreïn (2 mars), point de départ d’une année riche de 24 courses, Julien Fébreau, célèbre commentateur de Canal+, promet une saison plus «disputée» et «intéressante» en attendant l’arrivée de Lewis Hamilton chez Ferrari en 2025, qui fait déjà beaucoup parler.

Pour cette nouvelle saison, faut-il s’attendre à une nouvelle entière domination de Max Verstappen et Red Bull ?

Après avoir gagné 19 des 22 courses l’année dernière, on ne s’attend pas à voir Max Verstappen remporter les 24 Grands Prix au calendrier cette saison. Maintenant, il faut être réaliste aussi. Red Bull a extrêmement bien travaillé. Max Verstappen est au sommet de son art, de son talent, de ses capacités. Ils n’ont pas perdu de temps à l’été 2023 pour commencer à préparer leur saison 2024. Maintenant les points d'interrogation qu’on peut avoir à l’aube des essais hivernaux et cette nouvelle saison sont liés au choix de Ferrari et de Mercedes. Notamment de Ferrari qui a revu sa voiture à 95%. De son côté, Mercedes a changé de concept après avoir insisté pendant deux ans sur un style de voiture très épuré. Ces choix techniques doivent avoir pour répercussion une augmentation de la performance. Et puis Red Bull a peut-être aussi touché un plafond de performance ou en est proche.

Pensez-vous qu’on puisse assister à un resserrement des performances ?

Ce n’est pas impossible. On n’a pu le mesurer au dernier Grand Prix 2023 puisqu’en qualification, les 20 voitures étaient dans la même seconde. C’est quand même assez exceptionnel, quand on y pense, de se dire que dix équipes, aussi différentes soient-elles les unes des autres, soient capables de se retrouver dans une seule et même seconde au moment de l’exercice de la performance pure. Il y a des raisons de penser que ce sera un petit peu plus disputé cette année. Il faut l’espérer.

Est-ce possible de ne pas assister au 4e sacre de Max Verstappen ?

Il peut ne pas être champion du monde, seulement si, en face, Ferrari et Mercedes sont capables de fournir à leurs pilotes l’outil pour gagner des courses et qui viendrait s’ajouter au talent de Lewis Hamilton, de George Russell, de Charles Leclerc et de Carlos Sainz. Tous ces pilotes ont le talent pour remporter des Grands prix. Et s’ils se mettent à remporter des Grands prix, ça veut dire qu’ils seront dans la bataille pour le titre. Et je le redis, les victoires vont être plus disputées cette saison. Dans quelle mesure sera-t-il possible de battre Max Verstappen, je ne sais pas. Mais ça devrait tenir plus longtemps et les victoires devraient mieux se répartir cette année.

On se languit de voir un Lewis Hamilton roue contre roue avec son futur coéquipier Charles Leclerc

Vous n’avez pas cité Sergio Pérez…

C’est vrai. J’ai du mal à croire qu’après avoir été aussi dominé par un coéquipier il puisse prendre l’avantage sur lui. Je ne vois pas comment chez Red Bull, Sergio Perez pourrait renverser la machine incroyable qu’est Max Verstappen. Je peux me tromper, je lui souhaite que je me trompe, mais Max Verstappen est au-dessus du lot. L’équipe est tellement concentrée sur lui, l’écoute et les énergies sont portées sur lui. Le rôle d’un Sergio Perez est quasiment clairement énoncé, c’est le rôle d’un n°2 et d’un soutien à Max Verstappen. Même s’il n’a pas vraiment besoin de soutien d’un coéquipier. Je ne le place pas dans la course au titre. Qu’il remporte des Grands Prix, c’est possible. Il en a rapporté deux l’année dernière. Mais sur la longueur d’un championnat, qui plus est record avec 24 Grands Prix, j’ai du mal à croire à Sergio Pérez.

Est-ce qu’il pourrait y avoir une forme de résignation chez lui ?

Tant qu’ils sont en activité et au moins tant qu’ils sont dans une écurie, ils sont quand même formatés pour ne pas se résigner. C’est la grande force des professionnels. On parle souvent de pilotes amateurs et de pilotes professionnels. Là, il s’agit des plus grands pros de la planète et Sergio Pérez en fait partie. Et leur résilience, leur remise en question et leur capacité de régénérer leur mental sont assez époustouflantes. Ils sont programmés pour ne jamais lâcher et ils ont le devoir de croire, tous autant qu’ils sont, qu’ils vont battre leur coéquipier cette année et battre tous les autres pilotes.

Quels seront les centres d’intérêts de cette saison ?

Il y aura encore forcément plusieurs histoires à raconter. On a hâte de voir et savoir si Mercedes, Ferrari et McLaren seront capables de combler l'écart, même s’il n’est pas si grand, qui perdure avec Red Bull. Comment Lewis Hamilton va vivre sa dernière saison chez Mercedes. Tout comme Carlos Sainz, qui sait qui n'a plus de baquet chez Ferrari à la fin de l'année. A quel point va-t-il être collaboratif et coopérant avec les gens de chez Ferrari ? Beaucoup de pilotes vont également vouloir se montrer et donc prendre des risques dans l’espoir d’avoir un volant la saison prochaine. Et puis, j’aurais un œil aussi très particulier sur Oscar Piastri pour sa 2e saison en F1.

Et aussi sur Alpine, qui a déçu la saison dernière ?

Je vais être honnête, pourtant je les connais bien et je les apprécie beaucoup, mais je m’inquiète de savoir quelles répercussions tous les mouvements qui se sont produits dans l’écurie peuvent avoir à court terme. Ils se sont réorganisés, l’ambiance et l’état d’esprit sont bien meilleurs, mais les vagues créent forcément des échos et je m’inquiète un peu. Ils ont un moteur qui est légèrement moins performant, sur lequel ils ont fait le choix de ne pas retravailler de manière intensive, préférant se concentrer sur 2026. Donc on sait qu’Alpine part avec un petit mais déficit tout de même de performance moteur. J’espère que la voiture qu’ils vont sortir sera bonne mais j’ai des points d’interrogation. Pour l’instant, je suis très prudent quant aux performances d’Alpine. Il faut du temps pour revenir au sommet, ils ont des mastodontes face à eux et il leur faut encore un certain temps pour se remettre en ordre de bataille. L’état d’esprit, franchement, a bien changé. Mais l’état d’esprit ne fera pas tout.

L’annonce de l’arrivée de Lewis Hamilton chez Ferrari ne va-t-elle pas atténuer l’intérêt de cette saison 2024 ?

Dans un premier temps, effectivement, les plus grandes réactions que j’ai vues sur les réseaux sociaux étaient : «Est-ce qu’on peut aller directement à la saison 2025 ?» C’est la réaction passionnée et émotionnelle de beaucoup de personnes. Moi je trouve évidemment que cette annonce est exceptionnelle. Il faut bien mesurer que, tout sport confondu, c’est un transfert hors du commun. L’adage qui veut que les plus grands pilotes de la planète finissent par piloter pour Ferrari va se confirmer avec l’arrivée de Lewis Hamilton, qui a le plus grand palmarès de la F1 à égalité avec Michael Schumacher. C’est aussi un symbole. Mais dès 2024, ça va nous apporter des histoires à raconter. On se languit par exemple de voir un Lewis Hamilton roue contre roue avec son futur coéquipier Charles Leclerc. On a aussi hâte de voir comme cela va se passer en interne chez Mercedes. Est-ce que les portes vont progressivement se refermer sur Lewis Hamilton ? Est-ce qu’il va avoir de moins en moins accès à l’usine, au simulateur, aux réunions ? Ou s’il est dans une position de jouer le titre cette année, à quel point vont-ils jouer la carte de l’ouverture jusqu’au bout en sachant que quelques semaines après il sera dans le camp adverse ? Évidemment la première sortie, combinaison rouge, voiture rouge de Lewis Hamilton l’an prochain aux essais sera un moment historique de la Formule 1. Mais avant, dans l’approche de ce moment-là, on va vivre une saison 2024 très intéressante.

Comment va se passer la cohabitation avec Charles Leclerc ?

Déjà, il faut bien rappeler que contractuellement, il ne peut pas y avoir de n°1 ou de n°2. Légalement, ce n’est pas possible. Il faut aussi savoir que les deux pilotes ont été formés par Frédéric Vasseur, qui est le patron de Ferrari. Je serais surpris que Fred Vasseur change de discours à savoir, tant que les deux pilotes auront une chance, il les laissera batailler. À eux d’avoir l’intelligence de ne pas annihiler les opportunités. Mais si à un moment l’un des deux a beaucoup plus de chance, on demandera à l’autre de se mettre au service de l'équipe et de son coéquipier. Et l’un comme l’autre, ils ont cette intelligence. Il va y avoir une méga star et une star dans la même écurie et il va falloir les faire cohabiter. Mais ils ont un patron qui est Fred Vasseur et qui va avoir un rôle très important dans la relation de ces deux pilotes.

Quelles sont leurs relations dans le paddock

Elles sont bonnes. Il y a beaucoup de respect entre eux. Il y a quelques années à Bahreïn, quand Charles Leclerc était passé tout proche de remporter sa première victoire et que c’est finalement Lewis Hamilton qui s’est imposé, il y a eu une vraie sympathie et compassion de Lewis Hamilton à l’arrivée, qui lui a dit : «T’inquiète pas, tu vas en gagner. Tu es déjà exceptionnel comme pilote». Il y a beaucoup de respect entre eux. Mais, attention, ils sont faits du même bois. Ils veulent l’un et l’autre se battre. Évidemment pour Charles Leclerc, battre Lewis Hamilton serait une référence incroyable. Et il est chez lui chez Ferrari, alors que Lewis Hamilton sera un nouveau venu en 2025.

Savez-vous comment Charles Leclerc a accueilli l’arrivée de Lewis Hamilton ?

Je ne sais pas. Je pense que ça doit être toujours un peu impressionnant quand on vous annonce que Lewis Hamilton arrive chez vous. Mais je sais déjà la réponse qu’aura Charles Leclerc publiquement. Lui veut battre tout le monde, donc il veut battre Lewis Hamilton, que ce soit son coéquipier ou non. De toute façon, il veut être champion du monde et il veut battre tout le monde. Il sait qu’il va avoir affaire à une légende de la F1. Mais il connaît ses propres qualités. Tout comme les points sur lesquels il doit s'améliorer. À lui, dès 2024, de commencer à mettre en place sa stratégie pour être prêt au moment où Lewis Hamilton arrivera.

Est-ce vraiment le transfert du siècle malgré l’âge de Lewis Hamilton ?

Je maintiens que c’est le transfert du siècle. On parle d’un septuple champion du monde qui a fait dix-huit ans de carrière avec Mercedes et qui s’en va chez Ferrari à 40 ans. Pour moi, Lewis Hamilton est resté le Lewis Hamilton du passé. Depuis deux ans, il n’a plus la voiture pour gagner et on est dans un sport mécanique, il faut la bonne machine pour espérer s’imposer. C’est comme ça, c’est un fait. Ça fait deux ans qu’il ne l’a plus, mais il a remis à l’amende George Russell en 2023. Il lui a montré qui était le patron. Je suis persuadé qu’un Lewis Hamilton dans une bonne voiture, on va peut-être le voir dès cette année, est très difficile à battre. Je n’ai aucune inquiétude liée à l’âge et on peut tout à fait voir le meilleur de Lewis Hamilton chez Ferrari. S’il a une bonne voiture entre les mains. 

Quel pilote pourrait remplacer Lewis Hamilton chez Mercedes ?

Dans toutes les discussions et dans tout ce que l’on va pouvoir raconter cette année, c’est évidemment la question qu’on va se poser le plus. Ça devient le siège le plus chaud du paddock. Il y a beaucoup de pilotes qui arrivent en fin de contrat fin 2024. Ils sont 13 exactement. Il y a des favoris et ce que l’imprévu peut nous apporter. À l’heure actuelle, il serait logique d’envisager que Mercedes considère en priorité un pilote comme Esteban Ocon ou Kimi Antonelli, qui va débarquer en F2 et qui est un pur produit Mercedes. Ou alors, ils pourraient miser sur surprise, c’est-à-dire prendre un autre grand nom peut-être pour une seule année. Ils ont toute la latitude pour agir. Ils ne sont pas pressés, ils peuvent prendre leur temps. Ils vont pouvoir bloquer un peu le jeu des transferts. Lewis Hamilton leur a mis un sacré coup derrière la tête, en quittant et en annonçant aussi vite qu’il part chez Ferrari. Mais finalement la clé vient de se déplacer chez Mercedes. Et ils pourront faire attendre tous les pilotes aussi longtemps qu’ils le souhaitent.

Je ne vois pas comment Oscar Piastri ne pourrait pas être champion du monde dans les quatre années qui viennent

Croyez-vous à un retour de Sebastian Vettel ?

Je n’y crois pas du tout. J’aimerais me tromper parce que Sebastian Vettel est une légende. Il est forcément lié à tout le parcours qu’a eu son idole Michael Schumacher. Il n’a pas encore roulé chez Mercedes. Est-ce qu’un pilote allemand chez Mercedes aurait du sens en 2025 ? Il a de l’expérience, mais ça fera deux années qu’il n’aura pas piloté en Formule 1. Honnêtement, je ne crois pas du tout à Sebastian Vettel chez Mercedes, mais pourquoi pas une énorme surprise. 

Et chez Audi ?

J’ai du mal à y croire. J’ai du mal à croire à un retour de Sebastian Vettel en Formule 1. Et pourtant, j’aimerais beaucoup. 

Quel est votre top 3 pour cette saison ?

Max Verstappen, Lewis Hamilton et Charles Leclerc. J’en prends un dans chaque écurie. Et encore une fois, celui qui m’intéresse beaucoup, c’est Oscar Piastri. J’avais été marqué par l’arrivée de trois pilotes en F1 et lorsqu’ils avaient débarqué, je m’étais dit que c’était impossible qu’ils ne deviennent pas champion du monde. C’étaient Sebastian Vettel, Lewis Hamilton et Max Verstappen. Et c’est exactement la même chose pour Oscar Piastri. Je ne vois pas comment il ne pourrait pas être champion du monde dans les quatre ans qui viennent. Ce n’est pas possible. Il doit être champion du monde donc son évolution m’intéresse énormément. 

Il y a 24 Grands Prix au calendrier cette saison, n’est-ce pas un peu trop ?

C’est, de toute façon, le plafond maximal autorisé par les règlements. Maintenant, les règlements peuvent changer, mais on est au plafond. C’est effectivement beaucoup de Grands Prix. Mais c’est à la fois un bon signe. Ça veut dire que la Formule 1 se porte bien, qu’elle attire le public, qu’elle attire les pays qui ont envie d’exister dans ce calendrier. Ça pose aussi quelques problèmes et il faudra peut-être envisager, dans certains cas, l’alternance de Grand Prix pour rester au calendrier. On voit le cas de l’Espagne qui a maintenant potentiellement deux épreuves avec Barcelone et Madrid qui va faire son apparition. Ça amène aussi des courses qui varient la palette de couleurs que nous offrent les Grands Prix. On a des Grands Prix très traditionnels, historiques comme Monaco, Monza, Silverstone qui sont des berceaux du sport automobile. Et puis, il y a de nouvelles épreuves un petit peu plus spectaculaires dans tout ce qu’elles amènent autour de l’épreuve elle-même comme Las Vegas. Elles attirent les stars, brillent beaucoup et sont plus modernes dans leur approche.

En revanche, il n’y a pas de Grand Prix France…

C’est une grande déception parce que la France est un véritable berceau d’automobiles et de sport automobile. Elle mériterait évidemment d’avoir une épreuve. Il y a une envie d’un retour de cette épreuve. Le timing, pour l’instant, n’est pas le bon avec les Jeux olympiques qui vont vampiriser toute l’attention politique, financière, médiatique, dans les mois qui viennent. Mais en coulisses, ça travaille et on a de bonnes raisons d’espérer un retour à moyen terme d’un Grand Prix de France au calendrier.

Sous quelle forme ?

Il existe plusieurs projets. Il a été évoqué un projet dans la ville de Nice et dans la périphérie directe de la ville de Nice. Il existe évidemment toujours les infrastructures très spectaculaires du circuit Paul Ricard. Donc ce ne sont pas les possibilités qui manquent. Mais, il faut avant toute chose une volonté étatique parce que le financement et le soutien financier d’un Grand Prix de Formule 1 passe d’abord par une volonté de l’État. Et le président de la République a manifesté cette volonté une première fois il n’y a pas si longtemps.

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