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La semaine de Philippe Labro, les tontons font la loi, la pilule perd son papa

Philippe Labro, écrivain, cinéaste et journaliste. [THOMAS VOLAIRE]

Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour DirectMatin, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.

 

VENDREDI 22 NOVEMBRE

On m’a tellement sollicité à propos de cette date, le 50e anniversaire de la mort de JFK, qu’au moment où le téléphone sonne chez moi, ce soir-là, et que c’est RTL, puis, aussitôt, France Info, je me dis : «Ca y est, encore du Kennedy !» Eh bien non , la phrase tombe : «Georges Lautner est mort. Une réaction ?» J’émets quelques clichés, et je suis bien conscient que Les Tontons flingueurs vont être la seule référence. Or, Lautner a eu une superbe carrière, et d’autres excellents films à son actif.

Avec le recul, on doit se demander pourquoi ces «Tontons» ont dépassé le stade du simple cinéma pour atteindre un statut iconique. Qu’est ce qui fait qu’un tel film devienne «culte» ? Comme toujours, il y a plusieurs raisons : un casting de comédiens irrésistibles. Des tronches. Des voix. Des silhouettes. Ces gens avaient une incroyable capacité de dire sérieusement des phrases hilarantes. Blier, Ventura, Francis Blanche (dont on devra un jour tout revoir), Lefebvre, etc. Mais cela ne suffit pas. Le génie des dialogues d’Audiard, bien sûr. Mais encore ?

Une sensation, avec le passage du temps, que ce genre de comédie absurde, violemment parodique, aux antipodes de ce que l’intelligentsia parisienne tolérait, possède un parfum de «France profonde», celle de Jean Yann et San Antonio, celle des brèves de comptoir, des bistrots d’après ou avant match de foot, celle, aussi et c’est là où le mélange était subtil de Jarry, Rabelais, Jules Renard. Quelque chose d’un peu « anar », d’un peu fou, un peu surréaliste. Ca s’appelle une alchimie.

Pour réussir cette conjugaison, il fallait un sacré coup de patte, un sens du rythme, du montage, un respect inouï des comédiens, une profonde notion d’autodérision, un savoir-faire technique, celui qui consiste à ne jamais montrer qu’on l’a, ce savoir-faire. Et tout cela, c’était Lautner.

 

DIMANCHE 24 NOVEMBRE

Malgré une certaine embellie due à ce qu’on espère être un accord positif avec l’Iran à propos du nucléaire, tous les sondages venus des Etats-Unis indiquent une forte baisse de la popularité de Barack Obama.

On dirait qu’une vague de lassitude et de désillusion s’est emparée de ses électeurs les plus fidèles. On lit, sur le visage de cet homme que le pouvoir a forcément travaillé, ridé, grisonné, une impression, non pas de fatigue, ni de découragement, mais de cette vérité qui frappe un chef d’Etat, à un moment ou un autre de son mandat. «C’était donc ça ?»

 

LUNDI 25 NOVEMBRE

On apprend la disparition de Lucien Neuwirth, 89 ans, l’homme grâce à qui les femmes françaises eurent droit à l’autorisation de la pilule. C’est, tout simplement, un grand homme qui s’en va. Toute la presse a reproduit son historique entrevue avec de Gaulle qui lui dit : «Vous avez raison… continuez.»

Mais je suis tout autant épaté par le récit de ses années de jeune résistant qui, à l’âge de 16 ans, choisit de rejoindre Londres. Dans un tel parcours de vie, il faut s’arrêter à l’étonnant épisode de son parachutage aux Pays-Bas. Il est fait prisonnier, condamné à mort, fusillé par un peloton d’exécution. Mais la balle ricoche sur un portefeuille chargé de pièces de monnaie. Il vit !

Que s’est-il donc passé dans sa tête lorsqu’il faisait face au peloton ? Sortir d’un tel événement, survivre à une telle épreuve, avoir vécu un tel geste de fortune, de chance, appelez ça comme vous voudrez, a sans doute donné au jeune Neuwirth toutes les ressources nécessaires pour affronter, ensuite, bien plus tard, les conservateurs qui l’insultaient, parce qu’il militait pour la «régulation des naissances».

 

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