Deuxième film français en compétition, «Le Redoutable» de Michel Hazanavicius a été présenté à la presse samedi soir. Plutôt bien accueillie, cette comédie s'attaque au mythe Godard avec facétie.
Après «The Artist» (2011) et «The Search» (2014), le réalisateur de 50 ans est en lice pour la Palme d'or pour la troisième fois avec une comédie à l'idée assez géniale. «Le Redoutable» s'inspire du livre «Un an après», le récit autobiographique d'Anne Wiazemsky paru aux éditions Gallimard, épouse de Jean-Luc Godard à la fin des années 1960 et au début des années 1970.
Le film fait le portrait du réalisateur d'«A bout de souffle» du point de vue de sa compagne, de plus de 15 ans sa cadette et à travers leur relation tumultueuse. Le film débute en 1967 au moment où Godard tourne «La Chinoise». Il a déjà révolutionné le monde du cinéma et est mondialement célèbre. Mais lorsque son dernier long métrage est rejeté par la critique et que les bourgeons de mai 1968 éclosent, il entame une période de remise en question qui va le pousser à repenser sa manière de faire des films.
Il fallait toute l'audace du réalisateur d'«OSS 117» pour oser un biopic à l'opposé de l'hagiographie. Que celui-ci soit en plus montré à Cannes, festival dont l'histoire s'est forgée autour du cinéaste mythique qui a été sélectionné sept fois, relève quasiment d'un vaste plan marketing. En tout cas, les festivaliers ont pu savourer toute l'ironie de ce film et de cette sélection.
Un portrait mordant
Indubitablement drôle, «Le Redoutable» use de la grammaire cinématographique chère à Godard. Hazanavicius flanque son long métrage de tics de mise en scène (images en noir et blanc négatif, réflexion sur la nudité gratuite au cinéma, pensées des personnages révélées en sous-titre, messages écrits sur les murs...) qui rendent un vibrant hommage au génie filmique de Godard.
Choisi pour jouer ce monstre sacré du septième art à l'écran, Louis Garrel a adapté sa coiffure et surtout son phrasé pour incarner le redoutable cinéaste suisse. Beaucoup de festivaliers à la sortie de la projection ont salué sa prestation, faisant même le pronostic d'un potentiel prix d'interprétation masculine pour l'acteur.
Par-delà le jeu de Garrel et l'intrépide parodie, ce qui passionne davantage dans «Le Redoutable», c'est la révélation d'un artiste empêtré dans ses contradictions, confondant la vie et l'art et ayant si peur de vieillir qu'il en organise son propre suicide artistique.
En salles le 13 septembre.