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Crimes sexuels sur mineurs : «un interdit clair» examiné au Sénat

La chambre haute du Parlement s'empare d'un sujet délicat. Dans le sillage des affaires Matzneff, Duhamel et de la déflagration provoquée sur les réseaux sociaux avec le hashtag #MeTooInceste, le Sénat se penche, ce jeudi 21 janvier, sur une proposition de loi visant à créer un crime sexuel sur mineur, avec un seuil d'âge de non-consentement fixé à 13 ans.

Porté par Annick Billon, la présidente centriste de la délégation aux Droits des femmes, le texte a été adopté à l'unanimité en commission, et est le fruit d'une longue réflexion engagée depuis 2018 avec le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

Poser «un interdit clair»

Cosigné par une centaine de sénateurs de tous bords, dont, signe des temps, la moitié est issue des rangs de la droite, il vise à interdire «tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit» entre une personne majeure et un mineur de moins de 13 ans.

Concrètement, en-dessous de cet âge, un mineur serait donc automatiquement considéré comme non-consentant et l'adulte poursuivi pour crime.

Pour Annick Billon, il s'agit ainsi de poser «un interdit clair», pour une infraction qui, jusqu'ici, ne faisait effectivement pas l'objet d'une interprétation transparente dans le code pénal. 

En pratique, les relations sexuelles entre majeur et mineur sont en effet souvent requalifiées de viol en atteinte sexuelle, ce qui, à l'arrivée, revient à diviser par trois la peine encourue. Avec la proposition de loi examinée ce jeudi, le Sénat veut par conséquent y remédier.

Pour la sénatrice centriste qui porte le texte, l'âge de 13 ans correspond par ailleurs «à la limite indiscutable de l'enfance».

«A 13 ans, la question de l’enfance ne se pose pas, sa capacité de discernement ne peut pas être questionnée», avait-elle expliqué en commission.

De la même manière, ce seuil correspond à l’âge recommandé par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, comme mentionné dans un rapport récent. 

Sur ce sujet, l'agenda parlementaire bouleversé

Reste que pour certaines associations, mais aussi d'autres responsables politiques, il faut aller encore plus loin sur le chantier du consentement, et donc, sur la question du seuil d'âge.

Le Collectif pour l'enfance, qui regroupe 33 associations engagées dans ce combat, milite par exemple pour la création d'infractions sexuelles spécifiques pour les mineurs de moins de 15 ans.

Et à l'Assemblée nationale, le groupe socialiste va justement présenter devant les députés, à partir du 18 février, une autre proposition de loi répondant précisément à cet objectif, en sanctionnant les relations sexuelles entre un adulte et un mineur de moins de 15 ans.

Ce texte, porté cette fois par la députée du Val-de-Marne Isabelle Santiago, prévoit également, afin de «renforcer l'interdit de l'inceste», de créer un seuil d'âge spécifique de non-consentement pour les infractions sexuelles commises par un ascendant, qui serait fixé, lui, à 18 ans. Comparativement au texte du Sénat, cette proposition de loi socialiste est globalement davantage conforme aux attentes du secteur associatif.

Mais preuve que le sujet est définitivement en train de faire bouger les lignes, à la fois dans la société et dans le champ politique, la majorité LREM à l'Assemblée travaille elle aussi sur son propre texte qui doit être bouclé d'ici à la fin du mois de janvier. A la manoeuvre, la députée Alexandra Louis connue pour avoir été la rapporteur de la loi Schiappa qui ambitionne de «tout remettre à plat».

Mais si l'élue de la troisième circonscription des Bouches-du-Rhône entend tout faire pour que le gouvernement mette le plus rapidement possible son texte à l'agenda parlementaire, rien ne dit encore, concrètement, ce qu'il va sortir de l'initiative ni même si le temps sera suffisant pour qu'elle soit couronnée de succès. 

Dans le même esprit, concernant la proposition de loi centriste débattue au Sénat et celle, socialiste, défendue à l'Assemblée, il n'est pas tellement clair, à ce stade, de savoir dans quelle mesure ces textes puissent aboutir à des initiatives concrètes au regard des forces politiques en présence, avec une chambre haute à majorité de droite et une chambre basse acquise à LREM.

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