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Bâtiment 5 : «Il faut enseigner le théâtre au collège», défend l'acteur Steve Tientcheu, à l'affiche du nouveau film de Ladj Ly

Steve Tientcheu incarne Roger dans le dernier film de Ladj Ly, en salles le 6 décembre. [©Madou Daraamé]

À l'occasion de la sortie ce mercredi du film «Bâtiment 5» de Ladj Ly, l'acteur et réalisateur aulnaysien Steve Tchientcheu, toujours à l'affiche de la partie 3 de la série «Lupin», s'est confié à CNEWS.

Un passionné du jeu. Alors que les spectateurs le retrouveront dès ce mercredi 6 décembre dans «Bâtiment 5», film réalisé par Ladj Ly, Steve Tientcheu est revenu pour CNEWS sur son actualité, lui qui alterne avec aisance entre scène, petit et grand écran.

L'acteur originaire d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) enchaîne les rôles au cinéma («Sage Homme», 2023), («Normale», 2023), a partagé la vedette avec Omar Sy dans la partie 3 de la série «Lupin», et développe son association dans sa ville. 

Dans «Bâtiment 5», vous jouez le rôle de l'adjoint au maire. Le maire compte démolir un immeuble, et s'engage alors un dilemme pour le personnage que vous incarnez, entre l'édile et la population que vous tentez d'aider. Racontez-nous qui est Roger ?

Roger, l'adjoint au maire, est rentré en politique avec la volonté de changer les choses. À l'image d'Haby, le premier rôle incarné par Anta Diaw, il veut des améliorations. Il a les mêmes codes que tous les gens du quartier, et c'était un plus pour la mairie de le compter dans son équipe. Mais cela bascule Roger dans une certaine trahison, puisqu'il va se focaliser sur l'idée de progresser en politique coûte que coûte, ce qui le pousse à signer un pacte avec le maire. 

Ce film met en lumière des problèmes sociaux et sociétaux très actuels. Le mal logement, la précarité dans certains quartiers et ces plans de restructuration de la ville. Dans quelle mesure cela vous impacte-t-il ?

Cela touche toutes les banlieues. Même dans les campagnes, on rase certains endroits pour reconstruire des logements derrière. Mais le problème des expulsions pour ensuite être relogé à une centaine de kilomètres de chez soi, ça me touche. Je ne l'ai pas vécu personnellement, mais j'ai vu certaines familles être expulsées d’Aulnay-sous-Bois puis être relogées à Creil (Oise). Ce sont des gens qui n'ont rien demandé. Surtout que, pour en revenir à «Bâtiment 5», les gens expulsés dans le film sont propriétaires de leurs appartements. 

On vous avait vu dans un rôle clef d'un autre long-métrage de Ladj Ly en 2019, «Les Misérables», quatre fois récompensé aux César et à Cannes. Comment s'est faite la connexion pour intégrer le casting de «Bâtiment 5» ? 

On va dire que la page «Les Misérables» s'était tournée à peu près vers mars 2020. Ensuite Ladj était sur l'écriture d'«Athéna» (réalisé par Romain Gavras, sorti en 2022, ndlr), mais il m'avait dit, dès fin 2020, qu'il écrivait un rôle pour moi. Donc je savais que je serais dans le prochain, et c'était une fierté. Comme il sait que j'arrive avec beaucoup de propositions sur les plateaux, pour «Bâtiment» 5 je suis venu avec un grand buisson, et on a taillé ça ensemble. J'étais aussi un peu stressé, car il fallait confirmer après le succès du premier film de Ladj. Et surtout, on devait proposer autre chose dans ce rôle de Roger, l'adjoint au maire, par rapport au rôle du «maire» dans «Les Misérables», qui était un filou. 

Comment s'est passé le tournage ? Racontez-nous ce que vous avez ressenti...

Je pense que j'ai mûri. En voyant le rendu, je me suis dit que j'avais basculé dans autre chose. Attention, il restera toujours du travail, moi je suis toujours en préparation. Mais dans «Bâtiment 5», on a ressenti un peu l'esprit des «Misérables». On était en famille.

Lors du tournage, une entraide totale s'est créée.

Pour Anta Diaw, qui a mis la barre haute dans ce film, comme pour Aristote Luyindula, il y avait ce double challenge d'être des rôles aussi importants, et surtout pour la première fois. Donc les conseils que j'ai pu glisser, ça concernait plus la gestion de la carrière. Mais en tournage, c'est une entraide totale qui s'est créée. Et on éprouve tous un profond respect pour chacun. 

Vous jouez le rôle du méchant dans la partie 3 de «Lupin» sortie début octobre sur Netflix, avec Omar Sy. Quelles sont les différences sur le tournage d'une telle série ?

Ça va vite. Il faut être dans l'efficacité, mais de nos jours même dans le cinéma, tout va de plus en plus vite. Sur «Lupin», j'avais été repéré pour ma tête, parce que je fais flipper (rires). Ça collait bien avec le rôle que j'ai dans la série. Il y a une scène où un dialogue s'engage sur l'Arc de Triomphe avec Omar, c'est une belle scène. C'est sympa de tourner avec lui. Et même si cela va plus vite sur le format série, c'est un bon challenge. De toute façon, peut importe le projet ou le cadre, j'arrive préparé, et jamais la fleur au fusil. 

Justement, sur ce point, ça renvoie à l'accompagnement et aux conseils que vous prodiguez au sein de votre association «C'est une dinguerie», que vous avez ouverte à Aulnay-Sous-Bois. En quoi cela consiste et comment vous est venue cette idée ? 

Après «Les Misérables», je me suis dit qu'il fallait faire quelque chose. J'avais déjà cet exemple par rapport à Ladj Ly et l'école Kourtrajmé qu'il avait créée. Bon, après Kourtrajmé c'est une histoire, un collectif, les gars se connaissent depuis vingt-cinq ans pour la plupart. Il y a des comédiens, des animateurs, tout... Pas mal de grands réalisateurs sont d'ailleurs passés par cette école. Donc je me suis dit : j'aime ma ville. Je suis un pur aulnaysien. Je dis d'ailleurs souvent que mon pays, c'est Aulnay-Sous-Bois. J'ai décidé d'ouvrir cette association pour suciter des envies, des vocations, de faire découvrir le métier de comédien. Certains m'ont déjà dit, ce que tu fais je voulais le faire. Mais il ne le savaient pas ou ils n'ont peut être pas eu le courage de se lancer. 

Le théâtre c'est de l'éveil et, surtout, de la culture.

C'est aussi la faute de l'Éducation nationale, dans une certaine mesure. Normalement, au collège, on devrait enseigner le théâtre comme une matière, c'est-à-dire à raison de plusieurs heures par semaine. Même si tu ne finis pas comédien, le théâtre c'est de l'éveil. Et surtout de la culture. 

Des amis me demandent s'ils doivent inscrire leur fille au théâtre, je leurs réponds instantanément qu'il le faut. Il n'y a même pas de discussion là-dessus, tellement c'est important. 

En 2022, vous avez réalisé votre premier court-métrage, «La Chimère». Vous avez également connu les planches dans votre parcours. Est-ce que la création de pièces est une prochaine étape ? 

J'aimerais bien. Je viens du théâtre, j'ai été formé au Cours Simon et selon moi, c'est sur les planches qu'on voit si tu es bon. On ne triche pas au théâtre, cela se voit tout de suite. Au cinéma on peut être arrangé une fois la scène tournée. Mais au théâtre, il n'y a pas ce filet de sécurité face au public. Donc oui, j'aspire à mettre en scène.

Que pouvons-nous vous souhaiter pour la suite ? 

Beaucoup de bons projets. J'ai tourné une série qui s'appelle «Furies», avec Marina Foïs, Mathieu Kassovitz et Lina El Arabi, qui sortira bientôt. On est plongé au cœur de la mafia parisienne, mais dans un univers très actuel. Ce sont des gangsters élégants, très en couleur, et avec Marina avec qui j'ai eu le plaisir de tourner à trois reprises, on est un peu la «police de la mafia», on gère les liens entre toutes les familles. Lina El Arabi arrive en tant que nouvelle cheffe, et on va suivre les péripéties. Et bien sûr on peut me souhaiter d'avoir de grands rôles à défendre !

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