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Fonds Marianne : «fiasco», «dérive», «coup politique»... Les conclusions de la commission d’enquête du Sénat

Marlène Schiappa est aujourd'hui considérablement fragilisée. [Bertrand GUAY / AFP]

La commission d’enquête du Sénat a rendu ce jeudi 6 juillet ses conclusions, concernant le dossier controversé du Fonds Marianne initié par la secrétaire d’Etat Marlène Schiappa.

«Opacité», «désinvolture», «fiasco», «coup politique»... Par ces termes, la commission d'enquête du Sénat a fustigé ce jeudi le Fonds Marianne et la secrétaire d'Etat Marlène Schiappa, en rendant ses conclusions sur ce dossier particulièrement controversé.

«Le manque de rigueur, l'opacité et la désinvolture ont conduit au fiasco» du Fonds Marianne contre le séparatisme, mis en place en 2021 par Marlène Schiappa, a déclaré le rapporteur de la mission, Jean-François Husson (LR), lors de la conférence de presse au Sénat. «Le constat est sans appel sur la dérive de ce que nous appelons ‘un coup politique’».

«Nous avons le sentiment que le Fonds Marianne a été conçu comme une grande opération de communication» par la ministre, a ajouté Jean-François Husson. La «promesse» inhérente à ce dispositif «n'a pas été tenue, ce qui relève pleinement de la responsabilité politique de la ministre», a-t-il poursuivi.

Un «boulet» pour la République

Les conclusions de l’audition du 14 juin dernier étaient particulièrement attendues : après l'inspection générale de l'administration (IGA), c'était au tour de la commission d'enquête du Sénat de rendre ses conclusions jeudi sur ce fonds. Doté de 2,5 millions d'euros, il avait été créé en avril 2021 par Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté à l’époque, après l'assassinat du professeur Samuel Paty par un jeune radicalisé, afin de financer sur Internet des «contre-discours» à l'islam radical.

«Nous l'avons longuement auditionnée (...) je ne l'ai jamais vue proposer à notre commission d'enquête des éléments tangibles. Elle s'est largement défaussée sur le cabinet, elle a eu beaucoup de pertes de mémoire, il y a certaines prises de parole qui sont consternantes de mon point de vue, et affligeantes», s'est offusqué le sénateur.

Jean-François Husson a considéré que certaines des associations ayant bénéficié du fonds «ont effectué un vrai travail», néanmoins ce n'est pas le cas des deux principales d'entre elles. En effet, la première, l'Union des sociétés d'éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), a reçu la modique somme de 275.000 euros dont 120.000 euros qui ont servi à rémunérer deux de ses responsables, notamment Mohamed Sifaoui, auteur de livres sur l'islam politique et le terrorisme.

La seconde, «Reconstruire le commun», qui a obtenu 330.000 euros, a produit des vidéos dans lesquelles elle dénigrait des personnalités de gauche. Au final, le «label» du Fonds Marianne «devient un véritable fardeau», voire «un boulet attaché à l'allégorie de la République», a déploré le rapporteur.

Qui est responsable ?

Si Marlène Schiappa a certes assuré vouloir assumer sa «responsabilité politique», elle s’est complètement défaussée sur son administration. Elle a notamment souligné qu'elle n'avait pas fait partie du comité ayant sélectionné les associations lauréates, et qu'il ne lui incombait donc pas de suivre l'avancée des projets financés par l'argent public. Même situation du côté de Mohamed Sifaoui auditionné le 15 juin, qui a soutenu avoir été «piégé» et «manipulé par le pouvoir politique».

Dans un premier rapport publié début juin, l'IGA avait dénoncé de nombreux «manquements», à la fois dans le processus de candidature, puis dans l'utilisation des fonds par l'association. Les inspecteurs ont ainsi relevé de graves «irrégularités», comme par exemple «des doublements de salaires pour les deux porteurs du projet USEPPM», alors qu’en termes de contenus, les résultats étaient médiocres : 451 communications sur différents comptes, huit articles sur un site Internet.

A noter que la justice a également ouvert une enquête confiée à un juge d'instruction début mai, pour «détournement de fonds publics, détournement de fonds publics par négligence, abus de confiance et prise illégale d'intérêts» à l'encontre de la secrétaire d'Etat.

Grande figure au sein de la Macronie depuis 2017, Marlène Schiappa est aujourd'hui considérablement fragilisée, avec des appels répétés à la démission. Si pour le moment l’affaire suit son cours, le président de la République pourrait bel et bien l’évincer du gouvernement en cas de remaniement avant la rentrée.

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